Patrick Boucheron est né en 1965, à Paris. Après des études secondaires au lycée Marcelin Berthelot (Saint-Maur-des-Fossés) puis au lycée Henri IV (Paris), il entre à l'École normale supérieure de Saint-Cloud en 1985 et obtient l'agrégation d'histoire en 1988. C'est sous la direction de Pierre Toubert qu'il soutient en 1994 à l'université de Paris 1 sa thèse de doctorat d'histoire médiévale, publiée quatre ans plus tard sous le titre Le pouvoir de bâtir. Urbanisme et politique édilitaire à Milan (XIVe-XVe siècles), Rome, École française de Rome, 1998 (Collection de l'EFR, 239).
Maître de conférences en histoire médiévale à l'École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud de 1994 à 1999, puis à l'université de Paris 1 Panthéon-Sorbonne à partir de 1999, il fut membre junior de l'Institut universitaire de France de 2004 à 2009. En 2009, il soutient à l'université de Paris 1 une habilitation à diriger des recherches intitulée La trace et l'aura et est élu professeur d'histoire du Moyen Âge dans cette même université en 2012. Il est, depuis 2015, président du conseil scientifique de l'École française de Rome. Il a été élu la même année professeur au Collège de France sur la chaire « Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècle ».
04 - Politiques de l'amour
Patrice BoucheronHistoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleCollège de FranceAnnée 2023-2024Politiques de l'amour04 - Politiques de l'amour
1/30/2024 • 1 hour, 2 minutes, 16 seconds
03 - Politiques de l'amour
Patrice BoucheronHistoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleCollège de FranceAnnée 2023-2024Politiques de l'amour03 - Politiques de l'amour
1/23/2024 • 1 hour, 6 minutes, 15 seconds
02 - Politiques de l'amour : Trouble dans la charité
Patrice BoucheronHistoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleCollège de FranceAnnée 2023-2024Politiques de l'amourDu XIIe au XVIe siècle, d'une réforme à l'autre, mais aussi d'une renaissance à l'autre, les langages de l'amour investissent massivement les littératures européennes. Ne constituent-ils pas de ce fait la langue commune du politique, définissant de manière affective les rapports sociaux, entre convoitise et révérence, ferveur et vénération ? En tentant de comprendre ce qu'aimer veut dire au Moyen Âge, le cours de cette année mettra l'histoire de la subjectivité politique à l'épreuve des nouvelles approches historiographiques en matière de genre, d'émotions et de sexualité. Et ce par l'exploration de nouveaux corpus documentaires éclairant l'articulation entre arts de gouverner et arts d'aimer, la politisation du sentiment amoureux étant envisagée comme matrice des littératures du réveil de l'engagement politique.02 - Politiques de l'amour : Trouble dans la charité
1/16/2024 • 1 hour, 5 minutes, 2 seconds
01 - Politiques de l'amour : L'amour après la peste
Patrice BoucheronHistoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleCollège de FranceAnnée 2023-2024Politiques de l'amourDu XIIe au XVIe siècle, d'une réforme à l'autre, mais aussi d'une renaissance à l'autre, les langages de l'amour investissent massivement les littératures européennes. Ne constituent-ils pas de ce fait la langue commune du politique, définissant de manière affective les rapports sociaux, entre convoitise et révérence, ferveur et vénération ? En tentant de comprendre ce qu'aimer veut dire au Moyen Âge, le cours de cette année mettra l'histoire de la subjectivité politique à l'épreuve des nouvelles approches historiographiques en matière de genre, d'émotions et de sexualité. Et ce par l'exploration de nouveaux corpus documentaires éclairant l'articulation entre arts de gouverner et arts d'aimer, la politisation du sentiment amoureux étant envisagée comme matrice des littératures du réveil de l'engagement politique.01 - Politiques de l'amour : L'amour après la pesteRésuméDe l'épidémie au mal d'amour, l'une et l'autre sans remède, circule un même imaginaire de la contamination et de la fascination. C'est à l'étudier dans les doctrines et les langages de l'amour médiéval qu'est consacrée cette première séance introductive, pour placer l'objet d'étude entre fantasmes et fantaisies, mais aussi entre fictions et expériences politiques. Cet intérêt pour la métaphysique de l'amour ne doit pas éloigner d'une exigence d'histoire sociale. Aussi s'attache-t-on à comprendre cette thématique du regard amoureux à travers des textes (Guillaume de Machaut), des épisodes (le « coup de foudre » de Charles VI pour Isabeau de Bavière en 1385) et des images (les descchi da parto), comme ordo amoris et comme force d'effraction.SommaireLa peste, après la peste, l'amour après la peste : retour sur Guillaume de Machaut et MachiavelPendant la peste, contre la peste, avant la peste : l'incendie d'un cœur amoureux, vrai prologue du DecameronQu'est-ce que l'obscène ? Le retournement grotesque du dispositif boccacienLe sexe, l'effroi et le fascinus : les Priapées d'Arthur Forgeais (Zrinka Stahuljak, L'Archéologie pornographique. Médecine, Moyen Âge et histoire de France, 2018)Moralisme des anciens, moralisme des modernes : pour une histoire sociale et inclusive des politiques de l'amourDante et l'ordo amoris : la métaphysique de l'amour comme principe universel du mouvementPourquoi tomber amoureux ? Thomas d'Aquin et la force d'amour : « être attiré vers ce qui agit sur nous »Il n'y a pas de remède à l'amour : amor hereos et fascinatio de Constantin l'Africain à Marsile Ficin (Aurélien Robert, « Fascinatio », dans Mots médiévaux offerts à Ruedi Imbach, 2011)Gabriel Garcia Marquez, L'Amour au temps du choléra : la contamination du mal d'amourDe la physiologie à la phénoménologie de l'amour : le plus intense des vécus de conscience« L'acte d'un regard qui se rend à un autre regard en une commune insubstituabilité » (Jean-Luc Marion, Prolégomènes à la charité, 1983)Histoire d'un regard : le « coup de foudre » de Charles VI pour Isabeau de Bavière en 1385 (Paris 1400. Les arts sous Charles VI, 2004)Histoire de l'œil : l'effraction du désir (Michael Camille, L'Art de l'amour au Moyen Âge. Objets et sujets du désir, 2000)Histoire d'une idole : le Livre du Voir Dit de Guillaume de Machaut, simulacre (Jacqueline Cerquiglini-Toulet éd., 1999) et claustration (Alain Corbellari, dans Le Moyen Âge, 2022)Histoire d'un objet : Vénus vénérée sur un plateau d'accouchée, vulnérable dans son triomphe (Christiane Klapisch-Zuber, Mariages à la florentine. Femmes et vie de famille à Florence (XIVe-XVe siècle), 2020)Les littératures du réveil : arts de gouverner et arts d'aimerLe « réveil d'Entendement » d'Alain Chartier et Le Débat de réveille matin« Avoir la puce à l'oreille » : qu'entendre par là ? (Emma Cayley, Debate and Dialogue: Alain Chartier in his Cultural Context, 2003)Veille, vigilance et antécédence (Jean-Baptise Brenet, Demain la veille, 2023)Fictions, fantasmes ou fantaisies ? (Barbara Rosenwein, Love. Histoire d'un sentiment, 2023)Puritanisme, pornographie, sentimentalisme : deux livres de 1977 (Roland Barthes, Fragments d'un discours amoureux ; Pascal Bruckner et Alain Finkielkraut, Le Nouveau Désordre amoureux)Les luttes féministes et la repolitisation de l'intime (À propos d'amour de Bell Hooks, 2022)Actualité et inactualité des politiques de l'amour : quand « les mots font l'amour » (Raymond Queneau, Les Fleurs bleues, 1965).
1/9/2024 • 1 hour, 3 minutes, 56 seconds
Conférence - David Nirenberg : Antijudaism, Critical Thought, and the Possibility of History
Patrice BoucheronCollège de FranceHistoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleAnnée 2022-2023Conférence - David Nirenberg : Antijudaism, Critical Thought, and the Possibility of HistoryIntervenant(s)David Nirenberg, Director and Leon Levy Professor, Institute for Advanced Study, PrincetonConférence en anglais, organisée en collaboration avec le LEM (Laboratoire d'étude sur les monothéismes, UMR 8584).In my book Antijudaïsme (Labor et Fides, 2023), I proposed that we should understand the long history of Anti-Judaism not merely as the history of a prejudice, but also as the history of our Western religions (such as Christianity and Islam), philosophies (such as Idealism and Marxism), ethics and ideals. If this is true, then how can we be sure that our critical thought is truly critical? And how can we write history that helps us achieve the capacity to critique Anti-Judaism in the present, rather than reproducing it?
6/12/2023 • 48 minutes, 49 seconds
12 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
4/12/2022 • 1 hour, 10 minutes, 47 seconds
11 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
4/5/2022 • 1 hour, 4 minutes, 7 seconds
10 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
3/29/2022 • 1 hour, 4 minutes, 50 seconds
09 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
3/22/2022 • 1 hour, 6 minutes, 37 seconds
08 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
3/14/2022 • 6 minutes, 35 seconds
07 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
3/8/2022 • 1 hour, 2 minutes, 32 seconds
06 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
2/15/2022 • 1 hour, 5 minutes, 31 seconds
05 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
2/8/2022 • 1 hour, 5 minutes, 49 seconds
04 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
2/1/2022 • 1 hour, 2 minutes, 30 seconds
03 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
1/18/2022 • 1 hour, 1 minute, 57 seconds
02 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
1/11/2022 • 1 hour, 3 minutes, 51 seconds
01 - Après la peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2021-2022La peste noireRésuméPrenant la suite du cours de l'année précédente (« La peste noire »), ainsi que des trois journées d'études qui l'ont accompagné (« Nouvelles recherches sur la peste noire »), l'enseignement de cette année tentera d'en tirer toutes les conséquences du point de la narrativité du récit historique et de ses causalités. Plongeant dans la mémoire archivistique et textuelle de l'événement (la peste noire entre 1347 et 1352, entendue comme le moment paroxystique de la deuxième pandémie de peste), mais aussi dans les archives du vivant comme dans toutes celles que met désormais à disposition les sciences de l'environnement, la réflexion de l'année dernière a fait subir au récit traditionnel différents débordements disciplinaires. Dès lors se pose la question du point de vue : à quelle hauteur raconter cette histoire à la fois globale et discontinue ?C'est en convoquant à nouveaux frais les recherches sur la conjoncture politique, économique et sociale, mais aussi spirituelle et religieuse du temps de peste que nous tenterons de répondre à cette question. Elle embrasse à la fois des questions que l'historiographie se pose depuis longtemps (la crise de la fin du Moyen Âge, son rapport avec la réorganisation des pouvoirs publics) et d'autres plus récents, relatifs notamment aux paysages et à l'habitat, à l'environnement d'une manière générale, à l'histoire non seulement démographique mais sanitaire des populations survivantes. Elle propose de saisir toute cette histoire non seulement après ou d'après la peste, mais depuis elle, comme événement, comme durée et comme temporalité.
1/4/2022 • 1 hour, 1 minute, 38 seconds
12 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméÀ partir de l'analyse croisée du Jugement du roi de Navarre de Guillaume de Machaut, du Decameron de Boccace et de la correspondance de Pétrarque, cette dernière leçon tente de rassembler les acquis du cours autour de la question de l'agencement du temps. On y rencontre ce que l'on attendait (le rapport entre la calamité et le feu du récit), mais aussi ce que l'on n'attendait pas (la question de l'émancipation féminine et l'énigme de la violence antisémite). Avec toujours la même question : s'il y a bien un monde d'après la peste, se dit-il après elle ou d'après elle ?SommaireQu'avons-nous entendu ? Le bruit sourd de la tempête épidémique (« Si que ces tempestes cesserrent… », Guillaume de Machaut, Le Jugement du roi de Navarre, ensemble Gilles Binchois, dit par Jean-Paul Raccodon, 2001)Peste est le nom de ce que contre quoi on ne résiste pasLa mélancolie de Guillaume de Machaut, « poésie de la tension, de l'accord et du désaccord » (Jacqueline Cerquiglini-Toulet, "Un engin si soutil". Guillaume de Machaut et l'écriture au XIVe siècle, Paris, 2001)« Ce fu des orribles merveilles » : prologue apocalyptique et service du prince (Dominique Boutet, « L'Éloge du Prince et l'expérience de la mélancolie. Réflexions sur les facteurs de cohérence du Jugement du roi de Navarre de Guillaume de Machaut », dans Id. et Jacques Verger dir., Penser le pouvoir au Moyen Âge (VIIIe‑XVe siècle). Études d'histoire et de littérature offertes à Françoise Autrand, Paris, 2000)Des intentions politiques au fonctionnement poétique : la métafiction d'une ancienne affaire « mal taillée » (Robert Barton Palmer, « The metafictional Machaut: Self-reflexivity and Self-mediation in the two Judgment poems », Studies in the Literary Imagination, 20, 1987)L'auctorialité débordée, ou comment Guillaume de Machaut peine à contrôler ses lecteurs (Deborah McGrady, Controlling readers: Guillaume de Machaut and his late Medieval audience, Toronto, University of Toronto press, 2006)Guillaume de Machaut fut-il si discourtois ? Fictionner la fiction, refaire le procès (Laëtitia Tabard, « Contre-enquête au Moyen Âge : (re)faire le procès de Guillaume de Machaut », Premier symposium de critique policière. Autour de Pierre Bayard, 2017 : http://intercripol.org/fr/thematiques/critique-judiciaire/contre-enquete-au-moyen-age-re-faire-le-proces-de-guillaume-de-machautnew-page.html)En 1349, tout est à refaireL'entrée en guerre, la peste, et l'irruption du langage poétique : depuis l'Iliade, le roman de fondation de l'OccidentBoccace réécrit Thucydide, mais lui aussi a vu ce qu'il a vuAnnoter Le Decameron comme un texte de savoir (Enrica Zanin, « À la recherche de savoir. Les Marginalia dans les collections de nouvelles », dans Carine Roudière-Sébastien dir., Quand Minerve passe les monts. Modalités littéraires de la circulation des savoirs (Italie-France, Renaissance-XVIIe siècle), Pessac, 2020)Boccace, la preservatio sanitatis et la culture médicale (Anne Robin, « Boccace et les médecins du Décaméron ». Chroniques italiennes, 2011)La description de la peste à Florence, relevé d'une catastrophe révolue et mythe philosophique (Kurt Flasch, Poesia dopo la peste. Saggio su Boccaccio, Rome-Bari, 1994)La tourmente épidémique allume le feu des récitsDerrière le frontispice de « l'horrible commencement », le prologue et l'incendie d'un cœur amoureuxDe l'art de « n'être pas mort » quand quelque chose est mort en soi : le Decameron comme littérature de consolationMardi matin, Santa Maria Novella, « après bien des soupirs, cessant de dire des Pater, elles se mirent à converser de choses et d'autres touchant la nature de l'époque »« Qu'attendons-nous ? À quoi rêvons-nous ? » Sept jeunes femmes et trois hommes : la fin du deuil, ou une révolte lente à venirAlors c'est parti : Cat Power, « Black », Wanderer, 2018La grande faucheuse et le charnier : en 1338, tout est déjà en place, visible dans l'Allégorie de la Rédemption d'Ambrogio LorenzettiL'acte de créer, résistance et honte d'être un homme (Gilles Deleuze, Abécédaire, « R comme Résistance », 1989)Sur le palais qui couronne la colline, sacre de l'écrivain et compromissions politiques« Quand soudain » : l'irruption des frères chartreux fait de Pétrarque le narrateur de la peste (Familières, XVI, 2)Son frère, comme un modèle et un reproche : « pendant que mes visiteurs racontaient ces faits et bien d'autres de la sorte à ton sujet, l'évêque me regardait les yeux mouillés de larmes »« L'année 1348 de ces temps ultimes fut pour nous une année de deuil. Nous savons maintenant qu'elle n'a été que le commencement de notre deuil… » (Pétrarque à Boccace, 7 septembre 1363, Lettres de vieillesse, III, 1)L'année 1363, « la seizième depuis le début de nos malheurs » : la peste chez Pétrarque comme nouvelle ère1348 est « un pli dans l'ordre du temps qui dédouble le monde » et institue l'œuvre à venir (Étienne Anheim, « Pétrarque ou l'écriture d'une vie », Séminaire à l'EHESS , 25 novembre 2020)« Que faire maintenant, mon frère ? Voilà que nous avons déjà presque tout essayé et nous n'avons trouvé le repos nulle part. Quand l'attendre ? Où le chercher ? Le temps comme on dit a glissé entre nos doigts ; nos anciennes espérances ont été ensevelies avec nos amis. L'année 1348 a fait de nous des hommes esseulés et faibles » (Familères, I, 1)La peste chez Pétrarque, « moment inaugural de la temporalité comme mobile » (Étienne Anheim)Retour à Guillaume de Machaut et au Jugement du roi de Navarre : la peste n'ordonne pas le temps, mais le défaitLinéarité du dit, arche rythmique du motet : quand le temps se comprime mais ne se déroule pasLe Tohu bohu archaïque des « orribles merveilles » du prologue de Guillaume de Machaut : tempêtes, fléaux et épidémiesCalamitas et maladie du calame : écrire l'épaisseur des catastrophes (Thomas Labbé, Les Catastrophes naturelles au Moyen Âge, Paris, 2017)Sous la mortalitas, rien d'autre qu'une surmortalitéUn cri de haine dans un écrin de beauté : la « bête féroce » tapie dans le cantus firmus d'un motet de Guillaume de Machaut (Francesco Rocco Rossi, « Deux Cas paradigmatiques d'invective musicale dans la musique ancienne : "Fons totius superbiae/Livoris feritas/Fera pessima" de Guillaume de Machaut et "Sola caret monstris/Fera pessima" de Loyset Compère », dans Les Discours de la haine : Récits et figures de la passion dans la Cité, Villeneuve d'Ascq, 2009)L'accusation antisémite, avant le déclenchement épidémique : ordre narratif et désordres politiquesMaintenir l'énigme comme énigmeLe printemps à la fenêtre de Guillaume de Machaut : qui nous préviendra qu'il faut se décamérer ? (Nathalie Koble, Décamérez ! Des nouvelles de Boccace, Paris, 2021)Merci à la brigata, et salut.
4/6/2021 • 1 hour, 10 minutes, 27 seconds
11 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméLa recherche des causes de la peste, mais aussi l'expérimentation de remèdes susceptibles de soigner une maladie que l'on considère comme mortelle mais non incurable, met la médecine médiévale à l'épreuve de sa propre rationalité savante. Comment y intégrer cette contagion que l'on observe sans l'expliquer ? La transmission de la maladie est d'abord une métaphore de la contagion des péchés, rendant manifeste le pouvoir de l'imagination : voici pourquoi la compassio médiévale inspire des politiques qui ne sont pas toujours compassionnelles.Sommaire« Mortelle ou mortifère, contagieuse, ardente, cruelle… » : les épithètes de la peste de Maurice de La Porte en 1571 (Véronique Montagne, « Le Discours didascalique sur la peste dans les traités médicaux de la Renaissance : rationaliser et/ou inquiéter », Réforme, Humanisme, Renaissance, 2010)« Aspre, noire, charbonneuse… » : depuis quand la peste est-elle noire ? (Jon Arrizabalaga, « Facing the Black Death: perceptions and reactions of university medical practitioners », dans Roger French, Jon Arrizabalaga, Andrew Cunningham et Luis García-Ballester dir., Practical Medicine from Salerno to the Black Death, Cambridge, 1994)Peste noire et peur bleue en 1832 (Justus Hecker, Der schwarze Tod im vierzehnten Jahrhundert: Nach den Quellen für Ärzte und gebildete Nichtärzte bearbeitet, Berlin, 1832)Du rouge au noir, le mauvais sang de la mélancolie (Marie-Christine Pouchelle, « Les appétits mélancoliques », Médiévales, 1983)Avec le corps pour écran et pour tombeau : diagnostic, pronostic et sémiologie médicaleHistoires de la douleur, des premiers symptômes à l'apparition des bubonsÀ la recherche du signum mortis : « le mouvement de la mort n'est pas aussi certain que celui de la vie (Bernard de Godon, Liber pronosticorum, 1295, cité par Danielle Jacquart, « Le Difficile Pronostic de mort (XIVe- XVe siècles) », Médiévales, 2004)La médecine médiévale fut-elle honteuse ? Régimes de rationalités et diversité textuelle des Pestschiften (Karl Sudhoff)Le Traité sur les fièvres pestilentielles et autres formes de fièvres d'Abraham Caslari (Ron Barkai, « Jewish Treatise on the Black Death (1350-1500): A Preliminary Study », dans Roger French, Jon Arrizabalaga, Andrew Cunningham et Luis García-Ballester dir., Medicine from the Black Death to the French Disease, Londres, 1998)'Eliyahu ben 'Avraham à la cour de Sélim 1er à Constantinople et la médicalisation des savoirs politiques sur la peste dans l'Empire ottoman (Nükhet Varlik, Plague and Empire in the Early Modern Mediterranean World. The Ottoman Experience, 1347-1600, Cambridge, 2015)Écrire avant, pendant et après la peste : le manuscrit latin 111227 de la BnF et le Compendium de epidemia de la Faculté de médecine de Paris (Danielle Jacquart, La Médecine médiévale dans le cadre parisien, XIVe-XVe siècle, Paris, 1998)« À la vue des effets dont la cause échappe à la perspicacité des meilleures intelligences, l'esprit humain tombe dans l'étonnement » (Compendium de epidemia, 1348)Les limites de la raison médicale face aux « effets merveilleux » d'une maladie mortelle, mais non incurableLa conjonction astrale de 1345, remota causa de la pestilenceRecours à l'astrologie et inflexion alchimique du discours médical : une défaite de la raison ? (Nicolas Weill-Parot, « La rationalité médicale à l'épreuve de la peste : médecine, astrologie et magie (1348-1500) », Médiévales, 2004)Du bon usage thérapeutique de la richesse : or potable et pierres précieusesAir vicié, venin et contrepoison (Nicolas Weill-Parot, « Des rationalités en concurrence ? Empirica magiques et médecine scolastique », Anuario de Estudios Medievales, 2013)Ventouser, scarifier, cautériser : l'incision des bubons dans la Grande Chirurgie de Guy de Chauliac (1363)La recette du jeune poulet au croupion déplumé (Jacme d'Agramont, Regiment de preservacio de pestilencia, 1348)Empirica, experimenta ou secreta ? Longévité, obstination et créativité d'une « expérience de papier » (Erik A. Heinrichs, Erik Heinrichs, « The Live Chicken Treatment for Buboes: Trying a Plague Cure in Medieval and Early Modern Europe », Bulletin of the History of Medicine, 2017)« Pourquoi certaines maladies rendent-elles malades ceux qui s'approchent alors que personne n'est guéri par la santé ? » (Problemata, VII, 4)La compassion et le pouvoir de l'imagination (Béatrice Delaurenti, La Contagion des émotions. Compassio, une énigme médiévale, Paris, 2016)Dispositio morbida et forme spécifique, ou comment intégrer l'inexpliqué de la contagion humaine dans le système explicable des humeursCette « effrayante maladie qui nous envahit » : Gentile da Foligno, du commentaire du Canon d'Avicenne au Consilia contra pestilentiam (Joël Chandelier, Avicenne et la médecine en Italie. Le Canon dans les universités (1200-1350), Paris, 2017)« Si on nous demande : comment nous en remettre à la théorie de la contagion (da'wa-l-adwa) quand la loi nie cela, nous répondons : l'existence de la contagion est solidement établie par l'expérience, par l'étude, par la perception, par la constatation et par la fréquence des données. Ce sont les éléments de la preuve » (Ibn al-Hatib, Celle qui convainc le poseur de questions sur la maladie terrifiante, 1348, cité par François Clément, « À propos de la Muqni'at al-sa'id d'Ibn al-Hatib sur la peste à Grenade en 1348-1349 », dans Id., dir., Epidemies, épizooties. Des représentations anciennes aux approches actuelles, Rennes, 2017)Médecine arabe et refus des formes magiques de la contagion (Justin Stearns, Infectious ideas. Infectious ideas. Contagion in Premodern Islamic and Christian Thought in the Western Mediterranean, Baltimore, 2011)La souillure, la tâche et l'infection : seuls les péchés sont contagieux (Aurélien Robert, « Contagion morale et transmission des maladies : histoire d'un chiasme (XIIIe-XIXe siècle) », Tracés, 2011)Pourquoi faut-il isoler les lépreux ? Le morbus contagiosus de la maladie et la macule du péché (Maaike van der Lugt, « Les maladies héréditaires dans la pensée scolastique », dans L'Hérédité entre Moyen Âge et époque moderne, Florence, 2008)Pollution, contagion, scandale (Arnaud Fossier, « La contagion des péchés (XIe-XIIIe siècle) », Tracés, 2011)Le mauvais œil, la maladie d'amour et le pouvoir des femmes (Mary F. Wack, Lovesickness in the Middle Ages. The "Viaticum" and Its Commentaries, Philadelphie, 1990)Amour, altération de l'esprit, mélancolie : « La contagion de l'amour s'opère facilement et devient la peste la plus grave de toute » (Marsile Ficin, Commentaire sur le Banquet de Platon, VII, 5, 1469)Girolamo Fracastoro et le De Contagione et contagionis Morbis (1546) : une fausse rupture naturalistePharmacie médiévale de la peste et pharmakon« Cette langue qui halète, énorme et grosse, d'abord blanche, puis rouge, puis noire, et comme charbonneuse et fendillée… » (Antonin Artaud, Le Théâtre de la peste, 1938)De la métaphore meurtrière en régime analogique : quand le langage s'affole, la violence peut commencer à s'exercer.
3/30/2021 • 1 hour, 8 minutes, 5 seconds
10 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméLa recherche des causes de la peste, mais aussi l'expérimentation de remèdes susceptibles de soigner une maladie que l'on considère comme mortelle mais non incurable, met la médecine médiévale à l'épreuve de sa propre rationalité savante. Comment y intégrer cette contagion que l'on observe sans l'expliquer ? La transmission de la maladie est d'abord une métaphore de la contagion des péchés, rendant manifeste le pouvoir de l'imagination : voici pourquoi la compassio médiévale inspire des politiques qui ne sont pas toujours compassionnelles.Sommaire« Mortelle ou mortifère, contagieuse, ardente, cruelle… » : les épithètes de la peste de Maurice de La Porte en 1571 (Véronique Montagne, « Le Discours didascalique sur la peste dans les traités médicaux de la Renaissance : rationaliser et/ou inquiéter », Réforme, Humanisme, Renaissance, 2010)« Aspre, noire, charbonneuse… » : depuis quand la peste est-elle noire ? (Jon Arrizabalaga, « Facing the Black Death: perceptions and reactions of university medical practitioners », dans Roger French, Jon Arrizabalaga, Andrew Cunningham et Luis García-Ballester dir., Practical Medicine from Salerno to the Black Death, Cambridge, 1994)Peste noire et peur bleue en 1832 (Justus Hecker, Der schwarze Tod im vierzehnten Jahrhundert: Nach den Quellen für Ärzte und gebildete Nichtärzte bearbeitet, Berlin, 1832)Du rouge au noir, le mauvais sang de la mélancolie (Marie-Christine Pouchelle, « Les appétits mélancoliques », Médiévales, 1983)Avec le corps pour écran et pour tombeau : diagnostic, pronostic et sémiologie médicaleHistoires de la douleur, des premiers symptômes à l'apparition des bubonsÀ la recherche du signum mortis : « le mouvement de la mort n'est pas aussi certain que celui de la vie (Bernard de Godon, Liber pronosticorum, 1295, cité par Danielle Jacquart, « Le Difficile Pronostic de mort (XIVe- XVe siècles) », Médiévales, 2004)La médecine médiévale fut-elle honteuse ? Régimes de rationalités et diversité textuelle des Pestschiften (Karl Sudhoff)Le Traité sur les fièvres pestilentielles et autres formes de fièvres d'Abraham Caslari (Ron Barkai, « Jewish Treatise on the Black Death (1350-1500): A Preliminary Study », dans Roger French, Jon Arrizabalaga, Andrew Cunningham et Luis García-Ballester dir., Medicine from the Black Death to the French Disease, Londres, 1998)'Eliyahu ben 'Avraham à la cour de Sélim 1er à Constantinople et la médicalisation des savoirs politiques sur la peste dans l'Empire ottoman (Nükhet Varlik, Plague and Empire in the Early Modern Mediterranean World. The Ottoman Experience, 1347-1600, Cambridge, 2015)Écrire avant, pendant et après la peste : le manuscrit latin 111227 de la BnF et le Compendium de epidemia de la Faculté de médecine de Paris (Danielle Jacquart, La Médecine médiévale dans le cadre parisien, XIVe-XVe siècle, Paris, 1998)« À la vue des effets dont la cause échappe à la perspicacité des meilleures intelligences, l'esprit humain tombe dans l'étonnement » (Compendium de epidemia, 1348)Les limites de la raison médicale face aux « effets merveilleux » d'une maladie mortelle, mais non incurableLa conjonction astrale de 1345, remota causa de la pestilenceRecours à l'astrologie et inflexion alchimique du discours médical : une défaite de la raison ? (Nicolas Weill-Parot, « La rationalité médicale à l'épreuve de la peste : médecine, astrologie et magie (1348-1500) », Médiévales, 2004)Du bon usage thérapeutique de la richesse : or potable et pierres précieusesAir vicié, venin et contrepoison (Nicolas Weill-Parot, « Des rationalités en concurrence ? Empirica magiques et médecine scolastique », Anuario de Estudios Medievales, 2013)Ventouser, scarifier, cautériser : l'incision des bubons dans la Grande Chirurgie de Guy de Chauliac (1363)La recette du jeune poulet au croupion déplumé (Jacme d'Agramont, Regiment de preservacio de pestilencia, 1348)Empirica, experimenta ou secreta ? Longévité, obstination et créativité d'une « expérience de papier » (Erik A. Heinrichs, Erik Heinrichs, « The Live Chicken Treatment for Buboes: Trying a Plague Cure in Medieval and Early Modern Europe », Bulletin of the History of Medicine, 2017)« Pourquoi certaines maladies rendent-elles malades ceux qui s'approchent alors que personne n'est guéri par la santé ? » (Problemata, VII, 4)La compassion et le pouvoir de l'imagination (Béatrice Delaurenti, La Contagion des émotions. Compassio, une énigme médiévale, Paris, 2016)Dispositio morbida et forme spécifique, ou comment intégrer l'inexpliqué de la contagion humaine dans le système explicable des humeursCette « effrayante maladie qui nous envahit » : Gentile da Foligno, du commentaire du Canon d'Avicenne au Consilia contra pestilentiam (Joël Chandelier, Avicenne et la médecine en Italie. Le Canon dans les universités (1200-1350), Paris, 2017)« Si on nous demande : comment nous en remettre à la théorie de la contagion (da'wa-l-adwa) quand la loi nie cela, nous répondons : l'existence de la contagion est solidement établie par l'expérience, par l'étude, par la perception, par la constatation et par la fréquence des données. Ce sont les éléments de la preuve » (Ibn al-Hatib, Celle qui convainc le poseur de questions sur la maladie terrifiante, 1348, cité par François Clément, « À propos de la Muqni'at al-sa'id d'Ibn al-Hatib sur la peste à Grenade en 1348-1349 », dans Id., dir., Epidemies, épizooties. Des représentations anciennes aux approches actuelles, Rennes, 2017)Médecine arabe et refus des formes magiques de la contagion (Justin Stearns, Infectious ideas. Infectious ideas. Contagion in Premodern Islamic and Christian Thought in the Western Mediterranean, Baltimore, 2011)La souillure, la tâche et l'infection : seuls les péchés sont contagieux (Aurélien Robert, « Contagion morale et transmission des maladies : histoire d'un chiasme (XIIIe-XIXe siècle) », Tracés, 2011)Pourquoi faut-il isoler les lépreux ? Le morbus contagiosus de la maladie et la macule du péché (Maaike van der Lugt, « Les maladies héréditaires dans la pensée scolastique », dans L'Hérédité entre Moyen Âge et époque moderne, Florence, 2008)Pollution, contagion, scandale (Arnaud Fossier, « La contagion des péchés (XIe-XIIIe siècle) », Tracés, 2011)Le mauvais œil, la maladie d'amour et le pouvoir des femmes (Mary F. Wack, Lovesickness in the Middle Ages. The "Viaticum" and Its Commentaries, Philadelphie, 1990)Amour, altération de l'esprit, mélancolie : « La contagion de l'amour s'opère facilement et devient la peste la plus grave de toute » (Marsile Ficin, Commentaire sur le Banquet de Platon, VII, 5, 1469)Girolamo Fracastoro et le De Contagione et contagionis Morbis (1546) : une fausse rupture naturalistePharmacie médiévale de la peste et pharmakon« Cette langue qui halète, énorme et grosse, d'abord blanche, puis rouge, puis noire, et comme charbonneuse et fendillée… » (Antonin Artaud, Le Théâtre de la peste, 1938)De la métaphore meurtrière en régime analogique : quand le langage s'affole, la violence peut commencer à s'exercer.
3/23/2021 • 1 hour, 7 minutes, 13 seconds
09 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméDoit-on, et peut-on, combler les blancs de la carte de la diffusion de l'épidémie en Eurasie ? En interrogeant les silences documentaires de la Chine, de l'Inde et de l'Afrique subsaharienne, on suggère d'appréhender plutôt le monde archipélagique de la peste noire entre histoire globale et histoires connectées. La réflexion débouche donc sur des questions de méthode, touchant les rapports entre histoire environnementale et narrativité, Big Data et critique documentaire, hétérogénéité des sources et paradigme d'une connaissance par traces.SommaireTout le Moyen Âge : la peste comme opérateur de périodisation, de spatialité et de mondialitéUn monde en archipel, « la totalité vit de ses propres détails » (Édouard Glissant, Philosophie de la relation : poésie en étendue, 2009)Une « pestilence inattendue et universelle » (Robert d'Avesbury) : la rumeur de Chine« 1344. Fengxiang : sécheresse et criquets, grande famine, épidémie » : des sources chinoises à bas-bruit, et le grand fracas des ruptures politiques après 1350 (Timothy Brook, Le Léopard de Kubilaï Khan. Une histoire mondiale de la Chine, 2019En Inde également, les silences de la documentation (George Sussmann, « Was the Black Death in India and China? », Bulletin of the History of Medicine, 2011Distances, connexions, transmissions et immunité innée : en l'absence de Xenopsylla cheopisLa peste à Aden en 1436 : réseaux marchands et contagion épidémique en mer Rouge« En ces jours-là s'éleva contre tous les gens une peste telle qu'on ne peut la décrire » (Chronique de Zar'a Ya'eqob)Les « soldats du fléau » dans l'hagiographie éthiopienne (Marie-Laure Derat, « Du lexique aux talismans : occurrences de la peste dans la Corne de l'Afrique du XIIIe au XVe siècle », Afriques, 2018)« Les têtes d'Ifé, abandonnées par « une population saisie d'effroi » ? (Gérard Chouin, dans François-Xavier Fauvelle dir., L'Afrique ancienne, de l'Acacus au Zimbabwe, 2018)Une « exploration critique du silence » : abandons de sites archéologiques, transferts de population et transformations politiques (Gérard Chouin, « Fossés, enceintes et peste noire en Afrique de l'Ouest forestière (500-1500 AD) », Afrique : Archéologie & Arts, 9, 2013)L'Afrique aussi a droit à la peste noire : recherches génétiques et récits d'histoire-monde (Monica H. Green, « Putting Africa on the Black Death map: Narratives from genetics and history », Afriques, 2018)Le pic des années 1320, monde plein et système-mondeLa fin du Moyen Âge à l'âge de l'histoire globale (Bruce Campbell, The Great Transition: Climate, Disease and Society in the Late-Medieval World, 2015)Superposer les courbes ou établir des corrélations : questions de méthode (Jean-Philippe Genet, « De la "grande crise" à la "grande transition" : une nouvelle perspective ? », Médiévales, 2019)Beau Moyen Âge ou Medieval Climatic Anomaly ?A perfect storm : climat, écosystèmes et sociétésL'irradiation solaire et l'ENSO comme déterminant de dernière instanceRabi Levi ben Gershom et le bâton de Jacob, histoires d'un objet-monde (1342)Prendre le point de vue des étoiles ou « faire place à des histoires » ? (William Cronon, Nature et récits. Essais d'histoire environnementale, 2016)Retour à Jean-Noël Biraben (Les Hommes et la peste en France et dans les pays européens et méditerranéens, 1975), la démographie historique comme science moraleEncore une intrigue de méthode : comment transformer une collecte d'attestations documentaires d'épidémies de peste en base de données des plague outbreaks (Ulf Büntgen, Christian Ginzler et al., « Digitizing Historical plague », Clinical Infectious Diseases, 2012)Modélisations hâtives et cartographies incomplètes (Joris Roosen, Daniel R. Curtis (de Leiden), « Dangers of Noncritical use of Historical Plague Data », Emerging Infectious Diseases, 2018)De l'optimisme méthodologique de l'histoire sociale à la française aux vertiges des Big Data : la modélisation épidémiologique au péril de la critique des sources (George Christakos, Ricardo Olea, Marc Serre, Hwa-Lung Yu et Lin-Lin Wang, Interdisciplinary Public Health Reasoning and Epidemic Modelling: The Case of Black Death, 2015)Le Moyen Âge à la trace : un régime documentaireEadem die obiit : quand la mort passe dans un petit registre de comptes (Givry, 1348)Le Tout-Monde de la peste au « vrac des horizons » : « …La certitude aussi que la plus infime de ces composantes nous est irremplaçable » (Édouard Glissant, La Cohée du Lamentin, 2005).
3/16/2021 • 1 hour, 9 minutes, 53 seconds
08 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméPour l'histoire de la peste noire, l'épidémie qui affecte l'ensemble du bassin méditerranéen, et au-delà, de 541 à 749 constitue moins un précédent qu'une comparaison obligée, placée en vis-à-vis historiographique. Si elle occupe une branche morte de l'arbre phylogénétique de Yersinia pestis, sa postérité est ailleurs : dans les enjeux méthodologiques qu'elle pose aux historiens confrontés à la discordance des sources, mais aussi dans l'imaginaire politique : entre hantises collapsologiques du contemporain et horizon eschatologique du Moyen Âge, on tente de comprendre en quoi, au-delà des conventions historiographiques, cette peste peut bien être dite « justinienne ».Sommaire« Il faut continuer… » (Samuel Becket, L'Innommable, 1953) : recommencementsLa mémoire pathétique des gestes de la peste : quand le corps délivre une mémoire dont nous avons perdu le souvenir (Aby Warburg, Atlas Mnemosyne, 1927-1929)Épaissir le temps de la peste, peupler les mondes de la peste : réassurances des savoirs lettrés et blessure narcissiqueYersinia pestis et l'humanité souffrante : une maladie qui n'était pas notre genreProgrès scientifique et horizon de connaissances : la science pose de nouvelles questions à l'histoireLa génomique et la discordance des temps, une affaire de rythmes et d'échellesRetour au territoire de l'historien : l'hétérogénéité des régimes documentairesEntre histoire profonde et histoire globale, un regard à mi-penteLa peste dite « justinienne » : première épidémie historiqueUne branche morte sur l'arbre phylogénétique de Yersinia pestis mais un opérateur puissant de périodisation (Yujun Cui, Chang Yu et al., « Historical variations in mutation rate in an epidemic pathogen, Yersinia pestis », PNAS, 2013)Deux morts en Bavière : identification des premières victimes de la peste du VIe siècle au cimetière d'AlternerdingPremier bilan, nouvelles interrogations : quelle échelle, quelles datations ? (Marcel Keller, Maria A Spyrou et al., « Ancient Yersinia pestis genome from across Western Europe reveal early diversification during the First Pandemic (541-750) », PNAS, 2019)Ceci n'est pas un puzzleConstantinople, mars 542, « Il y eut en ce temps-là une pestilence qui manqua d'emporter la race humaine tout entière » (Procope de Césarée, Histoire des guerres, 2, 22)Harvard, 2015 : archéologie de la mort de masse (Michael McCormick, « Tracking mass death during the fall of Rome's empire », Journal of Roman Archaeology, 2015)Constantinople, 536 : « Combien il est étrange, je vous le demande, de voir le soleil mais sans son éclat habituel » (Cassiodore, Variae, 12, 25)Belfast, 2008 : analyse dendochronologique et carottes glaciaires (Michaël Baillie, « Proposed re‐dating of the European ice core chronology by seven years prior to the 7th century AD », Geophysical research letters, 2008)Constantinople, 541 : Justinien, les greniers de l'empire et les rats des navires (Michael McCormick, « Bateaux de vie, bateaux de mort. Maladie, commerce, transports annonaires et le passage économique du bas-empire au Moyen Âge », dans Morfologie sociali e culturali in Europa fra tardo antichità e alto medioevo (Spolète, 1998)Raconter l'histoire depuis le point de vue animal de rattus rattus ?Le « petit âge glaciaire de l'Antiquité tardive » (530-680) : systèmes climatiques et écosystèmes sociaux (Jean-Pierre Devroey, La Nature et le Roi. Environnement, pouvoir et société à l'âge de Charlemagne, 2019)En Scandinavie, du « grand hiver » (Fimbulvetr) au « crépuscule des dieux » (Ragnarök) : Winter is coming (Bo Gräslund et Neil Price, « Twilight of the gods? The "dust veil event" of AD 536 in critical perspective », Antiquity, 2012)Pourquoi la peste du VIe siècle peut être dite justinienne : catastrophe épidémique et retournement de situation politiqueCombiner les sources, malgré tout : Procope de Césarée et Jean d'Ephèse, « duo improbable », ont bien vu ce qu'ils ont vu (Kyle Harper, Comment l'Empire romain s'est effondré. Le climat, les maladies et la chute de Rome, 2019)Le silo mortuaire des tours de Sykai et le pressoir mystique : « vendange dans la grande cuve de la colère de Dieu » (Jean d'Ephèse, Chronique de Zuqnîn)Une épidémie qui avance par bonds : « Comme un champ de blé incendié, la ville fut soudainement enflammée par la pestilence » (Grégoire de Tours, Histoires des Francs, 9, 22)Ne pas révoquer la valeur documentaire des sources au motif de leur discontinuité (Michael McCormick, « Gregory of Tours on Sixth-Century Plague and Other Epidemics », Speculum, 2021)Les trois temps de la première pandémie : peste byzantine (542-600), accalmie du VIIe siècle (600-660), période ibérique (660-749) (Dimitri Stathakopoulos, Famine and Pestilence in the Late Roman and Early Byzantine Empire: A Systematic Survey of Subsistence Crisis and Epidemics, 2004)« … la peste justinienne, après avoir peut-être contribué à expliquer Mahomet, a pu aussi expliquer Charlemagne » (Jacques Le Goff et Jean-Noël Biraben, « La Peste du Haut Moyen Âge», Annales, 1969)Peste justinienne et peste noire : une comparaison historiographique inévitableLa peste et la chute des empires : lectures maximalistes, lectures déflationnistes (Lee Mordechai et Merle Eisenberg, « Rejecting Catastrophe: The Case of the Justinianic Plague », Past & Present, 2019)Kyle Harper et la fin du monde, ou la chute de Rome sans les Romains de la décadenceHantises collapsologiques et horizon eschatologique : la peste justinienne et le Moyen Âge aujourd'hui.
3/9/2021 • 1 hour, 2 minutes, 20 seconds
07 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméPour l'histoire de la peste noire, l'épidémie qui affecte l'ensemble du bassin méditerranéen, et au-delà, de 541 à 749 constitue moins un précédent qu'une comparaison obligée, placée en vis-à-vis historiographique. Si elle occupe une branche morte de l'arbre phylogénétique de Yersinia pestis, sa postérité est ailleurs : dans les enjeux méthodologiques qu'elle pose aux historiens confrontés à la discordance des sources, mais aussi dans l'imaginaire politique : entre hantises collapsologiques du contemporain et horizon eschatologique du Moyen Âge, on tente de comprendre en quoi, au-delà des conventions historiographiques, cette peste peut bien être dite « justinienne ».Sommaire« Il faut continuer… » (Samuel Becket, L'Innommable, 1953) : recommencementsLa mémoire pathétique des gestes de la peste : quand le corps délivre une mémoire dont nous avons perdu le souvenir (Aby Warburg, Atlas Mnemosyne, 1927-1929)Épaissir le temps de la peste, peupler les mondes de la peste : réassurances des savoirs lettrés et blessure narcissiqueYersinia pestis et l'humanité souffrante : une maladie qui n'était pas notre genreProgrès scientifique et horizon de connaissances : la science pose de nouvelles questions à l'histoireLa génomique et la discordance des temps, une affaire de rythmes et d'échellesRetour au territoire de l'historien : l'hétérogénéité des régimes documentairesEntre histoire profonde et histoire globale, un regard à mi-penteLa peste dite « justinienne » : première épidémie historiqueUne branche morte sur l'arbre phylogénétique de Yersinia pestis mais un opérateur puissant de périodisation (Yujun Cui, Chang Yu et al., « Historical variations in mutation rate in an epidemic pathogen, Yersinia pestis », PNAS, 2013)Deux morts en Bavière : identification des premières victimes de la peste du VIe siècle au cimetière d'AlternerdingPremier bilan, nouvelles interrogations : quelle échelle, quelles datations ? (Marcel Keller, Maria A Spyrou et al., « Ancient Yersinia pestis genome from across Western Europe reveal early diversification during the First Pandemic (541-750) », PNAS, 2019)Ceci n'est pas un puzzleConstantinople, mars 542, « Il y eut en ce temps-là une pestilence qui manqua d'emporter la race humaine tout entière » (Procope de Césarée, Histoire des guerres, 2, 22)Harvard, 2015 : archéologie de la mort de masse (Michael McCormick, « Tracking mass death during the fall of Rome's empire », Journal of Roman Archaeology, 2015)Constantinople, 536 : « Combien il est étrange, je vous le demande, de voir le soleil mais sans son éclat habituel » (Cassiodore, Variae, 12, 25)Belfast, 2008 : analyse dendochronologique et carottes glaciaires (Michaël Baillie, « Proposed re‐dating of the European ice core chronology by seven years prior to the 7th century AD », Geophysical research letters, 2008)Constantinople, 541 : Justinien, les greniers de l'empire et les rats des navires (Michael McCormick, « Bateaux de vie, bateaux de mort. Maladie, commerce, transports annonaires et le passage économique du bas-empire au Moyen Âge », dans Morfologie sociali e culturali in Europa fra tardo antichità e alto medioevo (Spolète, 1998)Raconter l'histoire depuis le point de vue animal de rattus rattus ?Le « petit âge glaciaire de l'Antiquité tardive » (530-680) : systèmes climatiques et écosystèmes sociaux (Jean-Pierre Devroey, La Nature et le Roi. Environnement, pouvoir et société à l'âge de Charlemagne, 2019)En Scandinavie, du « grand hiver » (Fimbulvetr) au « crépuscule des dieux » (Ragnarök) : Winter is coming (Bo Gräslund et Neil Price, « Twilight of the gods? The "dust veil event" of AD 536 in critical perspective », Antiquity, 2012)Pourquoi la peste du VIe siècle peut être dite justinienne : catastrophe épidémique et retournement de situation politiqueCombiner les sources, malgré tout : Procope de Césarée et Jean d'Ephèse, « duo improbable », ont bien vu ce qu'ils ont vu (Kyle Harper, Comment l'Empire romain s'est effondré. Le climat, les maladies et la chute de Rome, 2019)Le silo mortuaire des tours de Sykai et le pressoir mystique : « vendange dans la grande cuve de la colère de Dieu » (Jean d'Ephèse, Chronique de Zuqnîn)Une épidémie qui avance par bonds : « Comme un champ de blé incendié, la ville fut soudainement enflammée par la pestilence » (Grégoire de Tours, Histoires des Francs, 9, 22)Ne pas révoquer la valeur documentaire des sources au motif de leur discontinuité (Michael McCormick, « Gregory of Tours on Sixth-Century Plague and Other Epidemics », Speculum, 2021)Les trois temps de la première pandémie : peste byzantine (542-600), accalmie du VIIe siècle (600-660), période ibérique (660-749) (Dimitri Stathakopoulos, Famine and Pestilence in the Late Roman and Early Byzantine Empire: A Systematic Survey of Subsistence Crisis and Epidemics, 2004)« … la peste justinienne, après avoir peut-être contribué à expliquer Mahomet, a pu aussi expliquer Charlemagne » (Jacques Le Goff et Jean-Noël Biraben, « La Peste du Haut Moyen Âge», Annales, 1969)Peste justinienne et peste noire : une comparaison historiographique inévitableLa peste et la chute des empires : lectures maximalistes, lectures déflationnistes (Lee Mordechai et Merle Eisenberg, « Rejecting Catastrophe: The Case of the Justinianic Plague », Past & Present, 2019)Kyle Harper et la fin du monde, ou la chute de Rome sans les Romains de la décadenceHantises collapsologiques et horizon eschatologique : la peste justinienne et le Moyen Âge aujourd'hui.
3/2/2021 • 1 hour, 59 minutes, 8 seconds
06 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireDepuis dix ans, les progrès de la paléogénomique relancent l'histoire de la peste noire, par les réponses qu'ils apportent, mais surtout par les nouvelles questions qu'ils ouvrent. En tentant de comprendre le cadre épistémologique qui préside à la reconstitution phylogénétique de Yersinia pestis, on l'appréhende à la fois comme outil de périodisation et comme épreuve d'une réflexion sur l'hétérogénéité des régimes documentaires. Le programme de recherche sur la peste noire s'en trouve redéfini, entre naturalisme et constructivisme.SommaireUn cadavre exquis : Ramsès II au Val-de-Grâce en 1976Un pharaon peut-il mourir de la tuberculose ? (Bruno Latour, « Jusqu'où faut-il mener l'histoire des découvertes scientifiques ? », Chroniques d'un amateur de sciences, 2006)« La science construit ses objets » (Gaston Bachelard) : objets de connaissance, objets dans le monde« Mais quelle raison a pu conduire Latour à récuser la réponse de bon sens ? » (Paul Boghossian, La Peur du savoir. Sur le relativisme et le constructivisme de la connaissance, 2009)Desserrer l'étau d'une opposition binaire entre réalités naturelles et construits sociaux (Étienne Anheim et Stéphane Gioanni, « La nature, la construction sociale et l'histoire. Remarques sur l'œuvre de Ian Hacking » dans Michel de Fornel et Cyril Lemieux dir., Naturalisme vs constructivisme, 2009)Constructivisme des faits et nominalisme radical : les séductions d'un textualisme péremptoire« Nos savants au secours de Ramsès II tombé malade 3 000 ans après sa mort » : la leçon de philosophie de Paris-MatchUne expérience du temps historique : ouvrir le passé aux futurs de l'histoireQu'est-ce qu'une expérience de pensée ? « On donne généralement le nom de découverte à la connaissance d'un fait nouveau ; mais je pense que c'est l'idée qui se rattache au fait découvert qui constitue en réalité la découverte » (Claude Bernard, Introduction à la médecine expérimentale, 1865)Trois mots anglais pour dire la maladie : illness, disease, sickness (Horacio Fabrega, Evolution of Sickness and Healing, 1997)Le pouvoir médical, ou comment, diagnostiquant un disease, on transforme illness en sicknessLe rôle social du lépreux dans la société de persécution au Moyen ÂgeLes maladies ont une histoire : sur l'historiographie des « années SIDA » (Neithard Bulst et Robert Delort dir., Maladies et sociétés, XIIe-XVIIe siècles, 1988 ; François-Olivier Touati dir., Maladies, médecines et sociétés, 1993)Histoire de longue durée et histoire immédiate : la pathocénose comme « communauté de maladies » (Joël Coste, Bernardino Fantini et Louise Lambrichs dir., Le Concept de pathocénose de M.D. Grmek. Une conceptualisation de l'histoire des maladies, 2016)La septième pathocénose : un outil de périodisationQuand Yersinia pestis n'a pas besoin de nous : « l'homme n'est que son hôte secondaire, subsidiaire et, d'un point non anthropocentrique, peu important » (Mirko Grmek, « Préliminaires d'une étude historique des maladies », Annales, 1969)Londres, 1348 : le cimetière d'East-Smithfield (Barney Sloane, The Black Death in London, 2011)Sépultures de catastrophe et rites funéraires. Qu'est-ce qu'un cimetière de peste ? (Sacha Kacki, « Black Death: Cultures in Crisis », Encyclopedia of Global Archaeology, 2020)La collection ostéologique d'East-Smithfield : bioarchéologie de l'état sanitaire des populations (Sharon DeWitte)Depuis 2010, brève histoire de la paléogénomique (Ludovic Orlando, L'ADN fossile, une machine à remonter le temps, 2021)Quand le plus ancien en nous sert à mieux tolérer ce qui surgit de neuf : métissage, immunité innée et ingression archaïque (Lluis Quintana-Murci, « Génétique et histoire de l'homme : adaptation aux agents infectieux », dans Patrick Boucheron dir., Migrations, réfugiés, exils, 2017)Faut-il avoir peur de ce savoir ? Les mauvais souvenirs historiques d'une biologisation de l'anthropologie raciale (Jean-Paul Demoule, Mais où sont passés les Indo-Européens ? Le mythe d'origine de l'Occident, 2014)La tentation de fin de non-recevoir (Alain Testard, « Les modèles biologiques sont-ils utiles pour penser l'évolution des sociétés ? », Préhistoires méditerranéennes, 2011)2011, East Smithfield : une trace de Yersinia pestis (Kirsten I. Boos et al., « A draft genome of Yersinia pestis from victims of the Black Death », Nature, 478, octobre 2011)Une seule bactérie tueuse, plusieurs maladiesDe la peste justinienne à l'âge de Bronze : Quand Yersinia pestis prend de l'âgeDu stemma codicum à l'arbre phylogénétique : l'étrange familiarité d'une forme graphiqueLa peste justinienne et la peste noire de part et d'autre du « silence pathologique » (Pierre Toubert, « La Peste noire (1348), entre histoire et biologie moléculaire », Journal des savants, 2016)Trois pandémies ou cinq pestes ? (Monica Green, « The Four Black Deaths », The American Historical Review, 125, décembre 2020)Un événement théorique en Asie centrale : le « Big Bang » de la polytomie avant la peste noireLa carte au trésor : histoire globale et hétérogénéité des régimes documentairesRetour à Ramsès II : comment peut-on être tuberculeux sans avoir lu la Montagne magique de Thomas Mann ?« Mon corps est bien plus vieux que moi, comme si nous gardions toujours l'âge des peurs sociales auxquelles, par le hasard de la vie, nous avons touché » (Roland Barthes, Leçon, 1977).
2/9/2021 • 1 hour, 10 minutes, 15 seconds
05 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméLes modes de transmission de Yersinia pestis font l'objet d'études biologiques et épidémiologiques de plus en plus poussées, à partir du tableau clinique actuel mais aussi de la modélisation rétrospective des sources du passé. Pourtant, la virulence de l'épidémie médiévale reste difficilement compréhensible en appliquant de tels modèles. Le cours suggère d'autres hypothèses sur la possibilité d'une contagion interhumaine et la persistance de foyers pesteux en Europe, qui prennent en compte la dimension environnementale d'un récit global mais discontinu de l'épidémie.Sommaire« Depuis longtemps, la peste est mon métier » : Henri Mollaret, Jacqueline Brossolet et le service de la Peste de l'Institut PasteurDernières nouvelles de la troisième pandémie de peste (Eric Bertherat, World Health Organization, Weekly epidemiological record, 25, 2019)L'étiologie actuelle : essentiellement trois formes cliniques (septicémique, bubonique et pulmonaire)Quand le bubon ne suffit plus à établir le diagnostic rétrospectif : à la recherche des carbunculi (Samuel Cohn, Cultures of Plague. Medical thinking at the end of Renaissance, 2010)Menaces sur la biodiversité, résistance aux antibiotiques et bioterrorisme : l'économie de la recherche sur le bacille « dont le pouvoir pathogène pour l'homme est le plus élevé dans le monde bactérien » (Elisabeth Carniel)Tester rapidement l'antigène F1 de YP : les risques du passé et les retombées des hantises du présent (Raffaela Bianucci et al., CR Biologies, 2007)En URSS des années 1920 aux années 1970 : l'impossible éradication de la peste (Susan D. Jones et al., PNAS, 2019)Zoonose et sauts d'espèce : le schéma général de la transmission du puce à la rat et du rat à l'hommeUne progression par réplication de micro-événements (Monica Green, The Medieval Globe, 2014)Quand l'histoire passe par une piqûre de puce : microbiologie de l'infection (Amélie Dewitte et all, PLOS Pathogens, 2020)De la mort du rat à celle de l'homme : la peste au Caire en 1801 (Xavier Didelot, et al., J. R. Soc. Interface, 2017)Toujours au Caire, mais au XVe siècle, au temps du « grand anéantissement » (Stuart Borsch et Tarek Sabraa, Mamlῡk Studies Review, 2016)Un soupçon persistant sur pulex irritans (Katharine R. Dean et al., PNAS, 2018)La peste s'est diffusée dans les populations humaines avec une rapidité et une facilité qui ne sont guère compatibles avec le modèle classique de transmission du rat à la puce du rat puis à l'homme » (Isabelle Séguy et Guido Alfani, « La Peste : bref état des connaissances actuelles », Annales de démographie historique, 2017)La circulation des savoirs microbiologiques depuis Bombay, « théâtre d'expérimentation » de la peste (Pratik Chakrabarti)Pour en finir avec l'orientalisme épidémiologique : relectures historiennes des Rapports d'études sur la peste en Inde (Samuel Cohn, The Black Death Transformed, 2002)Mort et résurrection d'un paradigme (Samuel Cohn, « Black Death, End of a Paradigm » American Historical Review, 2002)« We believe that we can end the controversy: Medieval Black Death was Plague » : comment ne pas mettre fin à une controverse (Didier Raoult et al., PNAS, 2000)Des espèces aux milieux et de la Mongolie aux Alpes italiennes : cherchez la marmotte (V.V. Suntsov, Biol Bull Russ Acad Sci, 2012)Histoire de l'épidémie milanaise de 1567 et hypothèse sur la persistance de la peste en Europe (Ann Carmichael, The Medieval Globe, 2014)Retour aux sources : Avignon en 1348, Guy de Chauliac et Louis Sanctus de BeringenModélisation épidémiologique des sources démographiques traditionnelles : le cas de Nonantola en 1630 (Guido Alfani et Samuel Cohn, « Nonantola 1630: Anatomia di une pestilenza e mecanismi del contagio », Popolazione e Storia, 2, 2007)Sur la piste d'une contamination interhumaine : surmortalité et densité des foyers humains (Guido Alfani et Marco Bonetti, « A survival analysis of the last great European plagues: The case of Nonantola (Northern Italy) in 1630 », Population Studies, 73, 2019)Qui comincia il contaggio : la mort d'Antonia Tarossi et de sa famille« A Marseille, sur 150 Frères Mineurs il n'en resta pas un seul : c'est bien ainsi » : Henry Knighton et les petitesses de l'histoireHistoire naturelle ou histoires naturelles ? Un récit global mais discontinuAprès la nature, après l'histoire, restaurer la lisibilité de l'histoire en faisant droit à l'hétérogénéité des images« Le besoin de savoir était contredit par la tendance à fermer les yeux » (W.G. Sebald, De la destruction comme élément de l'histoire naturelle, 2001)Les yeux écarquillés et les yeux bandés : retour sur la scène du crime (Henri Mollaret et Jacqueline Brossollet, À propos des « Pestiférés de Jaffa » de A.J. Gros, 1968).
2/2/2021 • 1 hour, 7 minutes, 29 seconds
04 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméEntre fiction littéraire de la fête collective chez Jean Delumeau et fiction politique de la société de peste chez Michel Foucault, la séance interroge la constitution des savoirs historiens sur les épidémies de peste dans les années 1975-1985. Elle pose comme hypothèse que celle-ci est indissociable d'une certaine hantise contemporaine, ramenant le théâtre de la contagion aux structures narratives d'un récit épidémique.SommaireFestival d'Avignon, cour d'honneur, 9 juillet 1983 : « dans ce palais, il y a eu la peste et la papauté, ensemble, en 1348 » (Jean-Pierre Vincent)« Il y a dans le théâtre comme dans la peste quelque chose à la fois de victorieux et de vengeur (Antonin Artaud,« Le théâtre et la peste », 1938)Comment une société organise-t-elle son indestructibilité ?Microbiologie, environnement, world history : une histoire triplement débordéeVoir l'histoire à travers « l'imagination de la vérité du réel » (Goethe)Retour sur la « terrible puanteur des morts » à Marseille en 1347 : mémoire et inflammation de l'imaginaire« Les gestes de la peste, comme ceux de la peur et de la douleur en général, délivrent une mémoire dont nous avons perdu le souvenir » (Georges Didi-Huberman, Memorandum de la peste, 1983)Ecrire dans un théâtre dépeuplé : récit d'une coïncidence différée Une survivance chorale : « Mais à la peste il faut bien un narrateur, un qui puisse, qui ose dire mes yeux ont tout vu,il faut bien, tâche lourde ou non, un arpenteur du désastre, un mélancolique, un dont la maladie différait un peu des autres, maladie à la mort, non maladie mortelle, encore. Un qui pressent qu'il n'arrive pas à mourir » (Georges Didi-Huberman)La peste comme fête collective et comme cité assiégée : Jean Delumeau, La Peur en Occident (XIVe-XVIIIe siècles), 1978Une « rupture inhumaine » dans l'ordre ordinaire des joursLa persistance historiographique de « l'âpre saveur de la vie » (Elodie Lecuppre-Desjardins dir., L'odeur du sang et des roses. Relire Johan Huizinga aujourd'hui, 2019)Histoire des mentalités, médecine et psychologie des foules : la « dissolution de l'homme moyen » (Paul Fréour, « Réactions des populations atteintes par une grande épidémie », Revue de psychologie des peuples, 1960)Les traits anthropologiques fondamentaux d'une « société de peste »« Le Journal de la peste de Daniel Defoe — notre meilleur document sur une peste bien qu'il s'agisse d'un roman — est rempli de scènes hallucinantes et d'anecdotes bouleversantes » (Jean Delumeau)« l'homérique bataille de l'explosion et du colmatage, de la déliquescence et du durcissement, du désordre fou et de l'acharnée volonté de mise en ordre » (Bernard Chartreux, Dernières nouvelles de la Peste, 1984)Fiction littéraire de la fête chez Jean Delumeau, fiction politique de la peste chez Michel Foucault« Voici, selon un règlement de la peste de la fin du XVIIe siècle, les mesures qu'il fallait prendre quand la peste se déclarait dans une ville » (Surveiller et punir, 1975)Visible dans l'archive et rendant l'archive lisible : le paradigme foucaldien, entre singularité et exemplaritéA Marseille en 1720, société de surveillance et « expériences ordinaires de la peste » (Fleur Beauvieux)De 1347 à 1722, la deuxième pandémie de peste : à l'ombre du paradigmeLa fondation paradoxale des années 1975-1985 : savoirs historiens, indistinction chronologique et hantise théâtrale« Evidemment que c'est la peste. En voici les dernières nouvelles, on n'est jamais trop prudent. La peste donc, mais d'abord une peste, peu importe laquelle… » (Bernard Chartreux)Théâtre de la contagion et récit épidémique : trois actes et un patient zéroCharles Rosenberg, « What Is an Epidemic ? AIDS in Historical Perspective », Daedalus, 1989Le troisième acte ouvre seulement la possibilité de la fin de l'épidémie : ça finit quand, vraiment ?
1/26/2021 • 1 hour, 7 minutes, 31 seconds
03 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméEntre fiction littéraire de la fête collective chez Jean Delumeau et fiction politique de la société de peste chez Michel Foucault, la séance interroge la constitution des savoirs historiens sur les épidémies de peste dans les années 1975-1985. Elle pose comme hypothèse que celle-ci est indissociable d'une certaine hantise contemporaine, ramenant le théâtre de la contagion aux structures narratives d'un récit épidémique.SommaireFestival d'Avignon, cour d'honneur, 9 juillet 1983 : « dans ce palais, il y a eu la peste et la papauté, ensemble, en 1348 » (Jean-Pierre Vincent)« Il y a dans le théâtre comme dans la peste quelque chose à la fois de victorieux et de vengeur (Antonin Artaud,« Le théâtre et la peste », 1938)Comment une société organise-t-elle son indestructibilité ?Microbiologie, environnement, world history : une histoire triplement débordéeVoir l'histoire à travers « l'imagination de la vérité du réel » (Goethe)Retour sur la « terrible puanteur des morts » à Marseille en 1347 : mémoire et inflammation de l'imaginaire« Les gestes de la peste, comme ceux de la peur et de la douleur en général, délivrent une mémoire dont nous avons perdu le souvenir » (Georges Didi-Huberman, Memorandum de la peste, 1983)Ecrire dans un théâtre dépeuplé : récit d'une coïncidence différée Une survivance chorale : « Mais à la peste il faut bien un narrateur, un qui puisse, qui ose dire mes yeux ont tout vu,il faut bien, tâche lourde ou non, un arpenteur du désastre, un mélancolique, un dont la maladie différait un peu des autres, maladie à la mort, non maladie mortelle, encore. Un qui pressent qu'il n'arrive pas à mourir » (Georges Didi-Huberman)La peste comme fête collective et comme cité assiégée : Jean Delumeau, La Peur en Occident (XIVe-XVIIIe siècles), 1978Une « rupture inhumaine » dans l'ordre ordinaire des joursLa persistance historiographique de « l'âpre saveur de la vie » (Elodie Lecuppre-Desjardins dir., L'odeur du sang et des roses. Relire Johan Huizinga aujourd'hui, 2019)Histoire des mentalités, médecine et psychologie des foules : la « dissolution de l'homme moyen » (Paul Fréour, « Réactions des populations atteintes par une grande épidémie », Revue de psychologie des peuples, 1960)Les traits anthropologiques fondamentaux d'une « société de peste »« Le Journal de la peste de Daniel Defoe — notre meilleur document sur une peste bien qu'il s'agisse d'un roman — est rempli de scènes hallucinantes et d'anecdotes bouleversantes » (Jean Delumeau)« l'homérique bataille de l'explosion et du colmatage, de la déliquescence et du durcissement, du désordre fou et de l'acharnée volonté de mise en ordre » (Bernard Chartreux, Dernières nouvelles de la Peste, 1984)Fiction littéraire de la fête chez Jean Delumeau, fiction politique de la peste chez Michel Foucault« Voici, selon un règlement de la peste de la fin du XVIIe siècle, les mesures qu'il fallait prendre quand la peste se déclarait dans une ville » (Surveiller et punir, 1975)Visible dans l'archive et rendant l'archive lisible : le paradigme foucaldien, entre singularité et exemplaritéA Marseille en 1720, société de surveillance et « expériences ordinaires de la peste » (Fleur Beauvieux)De 1347 à 1722, la deuxième pandémie de peste : à l'ombre du paradigmeLa fondation paradoxale des années 1975-1985 : savoirs historiens, indistinction chronologique et hantise théâtrale« Evidemment que c'est la peste. En voici les dernières nouvelles, on n'est jamais trop prudent. La peste donc, mais d'abord une peste, peu importe laquelle… » (Bernard Chartreux)Théâtre de la contagion et récit épidémique : trois actes et un patient zéroCharles Rosenberg, « What Is an Epidemic ? AIDS in Historical Perspective », Daedalus, 1989Le troisième acte ouvre seulement la possibilité de la fin de l'épidémie : ça finit quand, vraiment ?
1/19/2021 • 1 hour, 8 minutes, 13 seconds
02 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noireRésuméEntre fiction littéraire de la fête collective chez Jean Delumeau et fiction politique de la société de peste chez Michel Foucault, la séance interroge la constitution des savoirs historiens sur les épidémies de peste dans les années 1975-1985. Elle pose comme hypothèse que celle-ci est indissociable d'une certaine hantise contemporaine, ramenant le théâtre de la contagion aux structures narratives d'un récit épidémique.SommaireFestival d'Avignon, cour d'honneur, 9 juillet 1983 : « dans ce palais, il y a eu la peste et la papauté, ensemble, en 1348 » (Jean-Pierre Vincent)« Il y a dans le théâtre comme dans la peste quelque chose à la fois de victorieux et de vengeur (Antonin Artaud,« Le théâtre et la peste », 1938)Comment une société organise-t-elle son indestructibilité ?Microbiologie, environnement, world history : une histoire triplement débordéeVoir l'histoire à travers « l'imagination de la vérité du réel » (Goethe)Retour sur la « terrible puanteur des morts » à Marseille en 1347 : mémoire et inflammation de l'imaginaire« Les gestes de la peste, comme ceux de la peur et de la douleur en général, délivrent une mémoire dont nous avons perdu le souvenir » (Georges Didi-Huberman, Memorandum de la peste, 1983)Ecrire dans un théâtre dépeuplé : récit d'une coïncidence différée Une survivance chorale : « Mais à la peste il faut bien un narrateur, un qui puisse, qui ose dire mes yeux ont tout vu,il faut bien, tâche lourde ou non, un arpenteur du désastre, un mélancolique, un dont la maladie différait un peu des autres, maladie à la mort, non maladie mortelle, encore. Un qui pressent qu'il n'arrive pas à mourir » (Georges Didi-Huberman)La peste comme fête collective et comme cité assiégée : Jean Delumeau, La Peur en Occident (XIVe-XVIIIe siècles), 1978Une « rupture inhumaine » dans l'ordre ordinaire des joursLa persistance historiographique de « l'âpre saveur de la vie » (Elodie Lecuppre-Desjardins dir., L'odeur du sang et des roses. Relire Johan Huizinga aujourd'hui, 2019)Histoire des mentalités, médecine et psychologie des foules : la « dissolution de l'homme moyen » (Paul Fréour, « Réactions des populations atteintes par une grande épidémie », Revue de psychologie des peuples, 1960)Les traits anthropologiques fondamentaux d'une « société de peste »« Le Journal de la peste de Daniel Defoe — notre meilleur document sur une peste bien qu'il s'agisse d'un roman — est rempli de scènes hallucinantes et d'anecdotes bouleversantes » (Jean Delumeau)« l'homérique bataille de l'explosion et du colmatage, de la déliquescence et du durcissement, du désordre fou et de l'acharnée volonté de mise en ordre » (Bernard Chartreux, Dernières nouvelles de la Peste, 1984)Fiction littéraire de la fête chez Jean Delumeau, fiction politique de la peste chez Michel Foucault« Voici, selon un règlement de la peste de la fin du XVIIe siècle, les mesures qu'il fallait prendre quand la peste se déclarait dans une ville » (Surveiller et punir, 1975)Visible dans l'archive et rendant l'archive lisible : le paradigme foucaldien, entre singularité et exemplaritéA Marseille en 1720, société de surveillance et « expériences ordinaires de la peste » (Fleur Beauvieux)De 1347 à 1722, la deuxième pandémie de peste : à l'ombre du paradigmeLa fondation paradoxale des années 1975-1985 : savoirs historiens, indistinction chronologique et hantise théâtrale« Evidemment que c'est la peste. En voici les dernières nouvelles, on n'est jamais trop prudent. La peste donc, mais d'abord une peste, peu importe laquelle… » (Bernard Chartreux)Théâtre de la contagion et récit épidémique : trois actes et un patient zéroCharles Rosenberg, « What Is an Epidemic ? AIDS in Historical Perspective », Daedalus, 1989Le troisième acte ouvre seulement la possibilité de la fin de l'épidémie : ça finit quand, vraiment ?
1/12/2021 • 1 hour, 2 minutes, 27 seconds
01 - La peste noire
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2020-2021La peste noire« In medias res » (introduction générale)RésuméLe passage de la mort dans la vie d'une femme, à Marseille, en 1348 : c'est ainsi que commence le cours de cette année in medias res. On y parle d'expérience et de narration, dans la continuité des leçons données l'année dernière, mais aussi de deuil et de progrès scientifiques, présentant les principaux enjeux d'une histoire à la fois globale et sociale de la peste noire. SommaireQuand l'événement est en cours, commencer « au milieu des choses »Marseille, août 1349 : Alayseta Paula devant son juge, « privée de tous ses proches, enceinte et affaiblie, continuellement remplie de chagrins et d'afflictions »La peste arrive à Marseille (Ole Jørgen Benedictow, The Black Death 1346-1353. The Complete History, 2004)« La terrible puanteur des morts » : une vision hallucinée de la peste noire, de Boccace à Antonin ArtaudRésilience notariale et résistance sociale à Marseille, Perpignan et Bologne (Shona Kelly Wray, Communities and Crisis. Bologna during the Black Death, 2009)Alayseta Paula dans le portrait de groupe des travailleuses marseillaises (Francine Michaud, Earning Dignity. Labour Conditions and Relations during the Century of the Black Death in Marseille, 2016)Propter pestilentiam : l'écho amorti de la catastrophe dans la documentation publique (François Otchakovsky-Laurens, La vie politique à Marseille sous la domination angevine (1348-1385), 2017)Une société politique qui résiste et qui s'adapte (Daniel Lord Smail, « Accommodating plague in Medieval Marseille », Continuity and Change, 1996)Pandémie et pestis universalis : « la violente mortalité due à la peste envoie en ce moment atrocement ses flèches partout » (Elisabeth Carpentier, Une ville devant la peste. Orvieto et la peste noire de 1348, 1962, rééd. 1993)Anno mortalitatis terribilis proxime decurso : un nom barré et l'évidence de l'histoireAvril 2020, un historien envoie sur internet une carte postale vidéo sur la peste noire (Daniel Lord Smail, « A Life in the Black Death: The Inventory of Alayseta Paula (Marseille, 1348) »)Avril 2020, un autre historien envoie sur internet une autre carte postale vidéo sur la peste noire (Patrick Boucheron, « Propos de chercheur »)Coïncidences ou concordance des temps ? Prétendre tirer les leçons du passé, c'est se préparer à « penser en retard » (Marc Bloch) : Guillaume Lachenal et Gaël Thomas, « L'histoire immobile du coronavirus », Comment faire ?, 2020Globaliser la peste noire (Monica Green dir., Pandemic Disease in the Medieval World. Rethinking the Black Death, 2014) et faire l'histoire de la santé globale (Monica Green, « Emerging diseases, re-ermerging histories », Centaurus, 2020)Le progrès historiographique par accumulation de savoirs : une histoire sociale et politique de la peste noire (Jean-Louis Biget, La grande peste noire, CD audio « De vive voix », 2001)Le progrès historiographique par révolution des paradigmes (Pierre Toubert, « La Peste noire (1348), entre histoire et biologie moléculaire », Journal des savants, 2016)Séquençage génomique et histoire environnementale : une histoire profonde de la peste noire est-elle possible ? (Daniel Lord Smail, Deep history and the Brain, 2008)Qui racontera cette histoire ? Retour sur Le conteur de Walter Benjamin (1936), lorsque se rompt la chaîne de « l'expérience qui suit son cours de bouche en bouche »Recommencer depuis Boccace et son « horrible commencement » (cours du 16 janvier 2018, « Boccace, le survivant et la tyrannie de la mort »)Freud le travail de l'histoire et le Trauerarbeit (Laurie Laufer, L'énigme du deuil, 2006)« La mort ne se laisse plus dénier ; on est forcé de croire en elle » (Sigmund Freud, « Considérations actuelles sur la guerre et la mort », 1915)Philippe Ariès et « l'humanité coutumière et résignée » d'avant 1914 (Stéphanie Sauget, « En finir avec le déni de mort ? Autour de Philippe Ariès », Sensibilités, 2020)Quand « l'ombre de l'objet est tombé sur le moi » (Sigmund Freud, « Deuil et mélancolie », 1917)L'effondrement mélancolique et l'épreuve de vérité.
1/5/2021 • 1 hour, 1 minute, 15 seconds
09 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
3/10/2020 • 1 hour, 3 minutes, 33 seconds
09 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
3/10/2020 • 1 hour, 3 minutes, 33 seconds
08 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
3/3/2020 • 1 hour, 4 minutes, 46 seconds
08 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
3/3/2020 • 1 hour, 4 minutes, 46 seconds
07 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
2/25/2020 • 1 hour, 2 minutes, 14 seconds
07 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
2/25/2020 • 1 hour, 2 minutes, 14 seconds
06 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
2/11/2020 • 1 hour, 2 minutes, 40 seconds
06 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
2/11/2020 • 1 hour, 2 minutes, 40 seconds
05 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
2/4/2020 • 1 hour, 2 minutes, 54 seconds
05 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
2/4/2020 • 1 hour, 2 minutes, 54 seconds
04 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/28/2020 • 1 hour, 4 minutes, 14 seconds
04 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/28/2020 • 1 hour, 4 minutes, 14 seconds
03 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/21/2020 • 1 hour, 1 minute, 3 seconds
03 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/21/2020 • 1 hour, 1 minute, 3 seconds
02 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/14/2020 • 1 hour, 5 minutes, 21 seconds
02 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/14/2020 • 1 hour, 5 minutes, 21 seconds
01 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/7/2020 • 1 hour, 3 minutes, 55 seconds
01 - Les inventions du politique (2) : narration et expérience
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2019-2020Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique (2) : narration et expérience
1/7/2020 • 1 hour, 3 minutes, 55 seconds
11 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales« Se sentir bête, incapable, incompétent, idiot » (Pierre Bourdieu, Sociologie générale, 2015) : l'effort de recherche comme un art de l'affaiblissementUne grammaire générative des possibles du politique au Moyen Âge est-elle possible ?Des régularités davantage que des règles, un style d'enquête plus qu'une méthode : récapitulations des résultats de la rechercheÉcrire l'histoire des problématisations : le passé est un réservoir de réponses, mais quelles étaient les questions ?Un exemple : l'institution podestataire comme expérimentation et comme invention du politique (Jean-Claude Maire Vigueur dir., I podestà dell'Italia comunale. Parte I – Reclutamento e circolazione degli ufficiali forestieri (fine XII sec-metà XIV sec.), Rome, 2000)Scalabilité et durabilité de l'expérience : les contours spatio-temporels de l'Italie communaleUne science du gouvernement au service de la concorde civique : l'art de la paroleDe Enrico Besta à Giovanni Tabacco, le débat historiographique sur les origines de la charge de la podestatUn moment révolutionnaire (Enrico Artifoni) ? Rythmes, espacement, événementLa consistance de la durée communale : un entassement des formes politiques et non une succession de régimesFuori, fuori il podestà : quand l'événement naît du dérèglement du rituel (Todi, 17 juillet 1268)Une microstoria de l'écart à la norme (Jean-Claude Maire Vigueur, « Échec au podestat : l'expulsion de Comacio Galluzzi, podestat de Todi », Bollettino della deputazione di storia patria per l'Umbria, 1995)Histoire émotionnelle d'une humiliation qui n'est pas souveraine : Comacio Galluzzi pleure de rage, puis se vengeÀ Murano également, en 1511, un raté de la ritualité politique (Claire Judde de la Rivière, La révolte des boules de neige. Murano face à Venise, 1511, 2014)Fins du Moyen Âge, finalités de son étude : retour sur les trois manières de raconter la disparition, avant récidive, des Laudes regiae (1377, 1530, 1918)Et comment raconter l'origine des acclamations royales ? Le coup d'État de 751 et la Donation de ConstantinLa tension entre onction et élection, visée de l'archéologie politique, « cet étrange mélange d'anachronisme tranquille et d'ethnocentrisme heureux » (Olivier Christin, Vox populi, 2014)Lorsque Ernst Kantorowicz réinterprétait le revival chevaleresque de la cour de Charles le Téméraire : « ce n'était plus la splendeur chatoyante de la chevalerie bourguignonne ; c'était la renommée universelle et les lauriers de César dont Charles brûlait d'envie » (cité par Robert Lerner)Les deux formes paradoxales de la stabilité politique au Moyen Âge : la fuite est possible, l'alternative est pensableLa commune italienne comme accentuation, et non comme exceptionAvant l'oublieuse Renaissance, présence de l'empire gréco-romain, gamme étendue des possibles politiquesRevenir a casa, une autre fois peut-être.
4/2/2019 • 1 hour, 3 minutes, 44 seconds
11 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales« Se sentir bête, incapable, incompétent, idiot » (Pierre Bourdieu, Sociologie générale, 2015) : l'effort de recherche comme un art de l'affaiblissementUne grammaire générative des possibles du politique au Moyen Âge est-elle possible ?Des régularités davantage que des règles, un style d'enquête plus qu'une méthode : récapitulations des résultats de la rechercheÉcrire l'histoire des problématisations : le passé est un réservoir de réponses, mais quelles étaient les questions ?Un exemple : l'institution podestataire comme expérimentation et comme invention du politique (Jean-Claude Maire Vigueur dir., I podestà dell'Italia comunale. Parte I – Reclutamento e circolazione degli ufficiali forestieri (fine XII sec-metà XIV sec.), Rome, 2000)Scalabilité et durabilité de l'expérience : les contours spatio-temporels de l'Italie communaleUne science du gouvernement au service de la concorde civique : l'art de la paroleDe Enrico Besta à Giovanni Tabacco, le débat historiographique sur les origines de la charge de la podestatUn moment révolutionnaire (Enrico Artifoni) ? Rythmes, espacement, événementLa consistance de la durée communale : un entassement des formes politiques et non une succession de régimesFuori, fuori il podestà : quand l'événement naît du dérèglement du rituel (Todi, 17 juillet 1268)Une microstoria de l'écart à la norme (Jean-Claude Maire Vigueur, « Échec au podestat : l'expulsion de Comacio Galluzzi, podestat de Todi », Bollettino della deputazione di storia patria per l'Umbria, 1995)Histoire émotionnelle d'une humiliation qui n'est pas souveraine : Comacio Galluzzi pleure de rage, puis se vengeÀ Murano également, en 1511, un raté de la ritualité politique (Claire Judde de la Rivière, La révolte des boules de neige. Murano face à Venise, 1511, 2014)Fins du Moyen Âge, finalités de son étude : retour sur les trois manières de raconter la disparition, avant récidive, des Laudes regiae (1377, 1530, 1918)Et comment raconter l'origine des acclamations royales ? Le coup d'État de 751 et la Donation de ConstantinLa tension entre onction et élection, visée de l'archéologie politique, « cet étrange mélange d'anachronisme tranquille et d'ethnocentrisme heureux » (Olivier Christin, Vox populi, 2014)Lorsque Ernst Kantorowicz réinterprétait le revival chevaleresque de la cour de Charles le Téméraire : « ce n'était plus la splendeur chatoyante de la chevalerie bourguignonne ; c'était la renommée universelle et les lauriers de César dont Charles brûlait d'envie » (cité par Robert Lerner)Les deux formes paradoxales de la stabilité politique au Moyen Âge : la fuite est possible, l'alternative est pensableLa commune italienne comme accentuation, et non comme exceptionAvant l'oublieuse Renaissance, présence de l'empire gréco-romain, gamme étendue des possibles politiquesRevenir a casa, une autre fois peut-être.
4/2/2019 • 1 hour, 3 minutes, 44 seconds
10 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
3/26/2019 • 1 hour, 5 minutes, 1 second
10 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
3/26/2019 • 1 hour, 5 minutes, 1 second
09 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
3/19/2019 • 1 hour, 2 minutes, 19 seconds
09 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
3/19/2019 • 1 hour, 2 minutes, 19 seconds
08 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
3/12/2019 • 1 hour, 5 minutes, 18 seconds
08 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
3/12/2019 • 1 hour, 5 minutes, 18 seconds
07 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
2/19/2019 • 1 hour, 1 minute, 44 seconds
07 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
2/19/2019 • 1 hour, 1 minute, 44 seconds
06 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévalesUn renversement archéologique : l'invention de Cola di RienzoQuand Vasari voit en Brunelleschi un voyant davantage qu'un visionnaireL'architecture est une cosa mentale : derrière les ruines, des villes invisibles et des vies potentiellesOptimisme constructif et « caractère destructeur » (Walter Benjamin, 1931) : « s'il met tout ce qui existe en ruine, ce n'est pas pour l'amour des ruines, mais pour le chemin qui se dessine entre elles »Freud, la ville et l'entassement des possibles (Malaise dans la civilisation, 1929) : « si nous voulons traduire dans l'espace la succession historique, nous ne pouvons le faire qu'en plaçant spatialement les choses côte à côte ; la même unité de lieu ne tolère point deux contenus différents »L'épreuve de modernité : les Dialogues des morts de Fontenelle (1683)Bâtir dit l'un, détruire dit l'autre : la mémoire saturée et l'oubli volontaire« Pompéi ne tombe en ruines que maintenant, depuis qu'elle est exhumée » (Freud, « L'homme aux rats »)Cola di Rienzo, piéton accablé des ruines de Rome, face à la violence sociale des barones urbisPassa-t-il « comme un météore ? » (Tommaso di Carpegna Falconieri, Cola di Rienzo, Rome, Salerno, 2002)L'Anonimo romano : la chronique d'une expérience politique (Chronique. Rome, le temps, le monde et la révolte de Cola di Rienzo, éd. et trad. Jacqueline Malherbe-Galy et Jean-Luc Nardone, Toulouse, 2015)Dunqua, da quale novitate comenzaraio ? Nouvelle et nouveauté : quand l'histoire commence, elle a déjà commencéRome, 1325, à hauteur d'un regard d'enfant apeuré« Organiser le peuple » : le paradoxe de la pars populi (Igor Mineo)« Je me tiens à l'écart » : écrire l'histoire pour ne pas percevoir « la guerre et les tourments qui se répandent dans tout le pays»Redresser la chronologie : l'expérience politique de Cola di Rienzo dans le contexte des Regimi di Popolo (Jean-Claude Maire Vigueur, L'autre Rome. Une histoire des Romains à l'époque communale (XIIe-XIVe siècle), Paris, 2010)Senza paura : munitiones, ouverture urbanistique et institutions médiévales de l'apaisementLe dictator et le langage d'apparat de l'ars dictaminis (Benoit Grévin, Rhétorique du pouvoir médiéval. Les Lettres de Pierre de la Vigne et la formation du langage politique européen (XIIIe-XVe siècle), Rome, École française de Rome, 2008)« Le beau style de la langue de Cola » : un choc émotionnelLa parole désarmante : le politique commence quand cesse la mise à mort (Jean-Claude Milner, Pour une politique des êtres parlants. Court traité politique 2, Lagrasse, 2011)« Il s'habillait comme un véritable tyran d'Asie. Déjà il montrait qu'il voulait par la force gouverner en tyran » : l'habit, le moine et la signature« Alors le tribun commença à se faire haïr » : circulation des affects et rétention corporelleRome, « sa nourriture et sa paralysie » (Jacques Le Goff) : quel miroir de Rome Cola di Rienzo opposait-il à ses concitoyens ?Savoir déchiffrer les reproches que nous font les ruines de la grandeurRenversement, profanation, lisibilité : la Lex de imperio VespasianiEncore les ruines d'Anna Tsing, là où « peut [se] capter la senteur des communs latents et cet arôme d'automne insaisissable »Encore les ruines de Michel Butor : « Chers amis je vous avise du fin fond du Moyen Âge »Des ruines d'avenir, pour ne pas installer l'Apocalypse à demeure« Bientôt, nous dépassions les rues jaunies par l'éclairage dit urbain, et nous rejoignions nos quartiers de prédilection, c'est-à-dire de naufrage » (Antoine Volodine, Des anges mineurs, Paris, 1999)Le Constructive Reenactment de Robin Collingwood (Alain de Libera, L'Archéologie philosophique, Paris, 2016)L'histoire nous fournit un gisement d'énoncés sous forme de solutions, mais à quelles questions ?Anachronime, feinte et agency : rejouer l'histoire (Rémy Besson, « Le reenactment en question : entretien avec Anne Bénichou », www.entre-temps.net)
2/12/2019 • 1 hour, 1 minute, 15 seconds
06 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévalesUn renversement archéologique : l'invention de Cola di RienzoQuand Vasari voit en Brunelleschi un voyant davantage qu'un visionnaireL'architecture est une cosa mentale : derrière les ruines, des villes invisibles et des vies potentiellesOptimisme constructif et « caractère destructeur » (Walter Benjamin, 1931) : « s'il met tout ce qui existe en ruine, ce n'est pas pour l'amour des ruines, mais pour le chemin qui se dessine entre elles »Freud, la ville et l'entassement des possibles (Malaise dans la civilisation, 1929) : « si nous voulons traduire dans l'espace la succession historique, nous ne pouvons le faire qu'en plaçant spatialement les choses côte à côte ; la même unité de lieu ne tolère point deux contenus différents »L'épreuve de modernité : les Dialogues des morts de Fontenelle (1683)Bâtir dit l'un, détruire dit l'autre : la mémoire saturée et l'oubli volontaire« Pompéi ne tombe en ruines que maintenant, depuis qu'elle est exhumée » (Freud, « L'homme aux rats »)Cola di Rienzo, piéton accablé des ruines de Rome, face à la violence sociale des barones urbisPassa-t-il « comme un météore ? » (Tommaso di Carpegna Falconieri, Cola di Rienzo, Rome, Salerno, 2002)L'Anonimo romano : la chronique d'une expérience politique (Chronique. Rome, le temps, le monde et la révolte de Cola di Rienzo, éd. et trad. Jacqueline Malherbe-Galy et Jean-Luc Nardone, Toulouse, 2015)Dunqua, da quale novitate comenzaraio ? Nouvelle et nouveauté : quand l'histoire commence, elle a déjà commencéRome, 1325, à hauteur d'un regard d'enfant apeuré« Organiser le peuple » : le paradoxe de la pars populi (Igor Mineo)« Je me tiens à l'écart » : écrire l'histoire pour ne pas percevoir « la guerre et les tourments qui se répandent dans tout le pays»Redresser la chronologie : l'expérience politique de Cola di Rienzo dans le contexte des Regimi di Popolo (Jean-Claude Maire Vigueur, L'autre Rome. Une histoire des Romains à l'époque communale (XIIe-XIVe siècle), Paris, 2010)Senza paura : munitiones, ouverture urbanistique et institutions médiévales de l'apaisementLe dictator et le langage d'apparat de l'ars dictaminis (Benoit Grévin, Rhétorique du pouvoir médiéval. Les Lettres de Pierre de la Vigne et la formation du langage politique européen (XIIIe-XVe siècle), Rome, École française de Rome, 2008)« Le beau style de la langue de Cola » : un choc émotionnelLa parole désarmante : le politique commence quand cesse la mise à mort (Jean-Claude Milner, Pour une politique des êtres parlants. Court traité politique 2, Lagrasse, 2011)« Il s'habillait comme un véritable tyran d'Asie. Déjà il montrait qu'il voulait par la force gouverner en tyran » : l'habit, le moine et la signature« Alors le tribun commença à se faire haïr » : circulation des affects et rétention corporelleRome, « sa nourriture et sa paralysie » (Jacques Le Goff) : quel miroir de Rome Cola di Rienzo opposait-il à ses concitoyens ?Savoir déchiffrer les reproches que nous font les ruines de la grandeurRenversement, profanation, lisibilité : la Lex de imperio VespasianiEncore les ruines d'Anna Tsing, là où « peut [se] capter la senteur des communs latents et cet arôme d'automne insaisissable »Encore les ruines de Michel Butor : « Chers amis je vous avise du fin fond du Moyen Âge »Des ruines d'avenir, pour ne pas installer l'Apocalypse à demeure« Bientôt, nous dépassions les rues jaunies par l'éclairage dit urbain, et nous rejoignions nos quartiers de prédilection, c'est-à-dire de naufrage » (Antoine Volodine, Des anges mineurs, Paris, 1999)Le Constructive Reenactment de Robin Collingwood (Alain de Libera, L'Archéologie philosophique, Paris, 2016)L'histoire nous fournit un gisement d'énoncés sous forme de solutions, mais à quelles questions ?Anachronime, feinte et agency : rejouer l'histoire (Rémy Besson, « Le reenactment en question : entretien avec Anne Bénichou », www.entre-temps.net)
2/12/2019 • 1 hour, 1 minute, 15 seconds
05 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévalesUn renversement archéologique : l'invention de Cola di RienzoQuand Vasari voit en Brunelleschi un voyant davantage qu'un visionnaireL'architecture est une cosa mentale : derrière les ruines, des villes invisibles et des vies potentiellesOptimisme constructif et « caractère destructeur » (Walter Benjamin, 1931) : « s'il met tout ce qui existe en ruine, ce n'est pas pour l'amour des ruines, mais pour le chemin qui se dessine entre elles »Freud, la ville et l'entassement des possibles (Malaise dans la civilisation, 1929) : « si nous voulons traduire dans l'espace la succession historique, nous ne pouvons le faire qu'en plaçant spatialement les choses côte à côte ; la même unité de lieu ne tolère point deux contenus différents »L'épreuve de modernité : les Dialogues des morts de Fontenelle (1683)Bâtir dit l'un, détruire dit l'autre : la mémoire saturée et l'oubli volontaire« Pompéi ne tombe en ruines que maintenant, depuis qu'elle est exhumée » (Freud, « L'homme aux rats »)Cola di Rienzo, piéton accablé des ruines de Rome, face à la violence sociale des barones urbisPassa-t-il « comme un météore ? » (Tommaso di Carpegna Falconieri, Cola di Rienzo, Rome, Salerno, 2002)L'Anonimo romano : la chronique d'une expérience politique (Chronique. Rome, le temps, le monde et la révolte de Cola di Rienzo, éd. et trad. Jacqueline Malherbe-Galy et Jean-Luc Nardone, Toulouse, 2015)Dunqua, da quale novitate comenzaraio ? Nouvelle et nouveauté : quand l'histoire commence, elle a déjà commencéRome, 1325, à hauteur d'un regard d'enfant apeuré« Organiser le peuple » : le paradoxe de la pars populi (Igor Mineo)« Je me tiens à l'écart » : écrire l'histoire pour ne pas percevoir « la guerre et les tourments qui se répandent dans tout le pays»Redresser la chronologie : l'expérience politique de Cola di Rienzo dans le contexte des Regimi di Popolo (Jean-Claude Maire Vigueur, L'autre Rome. Une histoire des Romains à l'époque communale (XIIe-XIVe siècle), Paris, 2010)Senza paura : munitiones, ouverture urbanistique et institutions médiévales de l'apaisementLe dictator et le langage d'apparat de l'ars dictaminis (Benoit Grévin, Rhétorique du pouvoir médiéval. Les Lettres de Pierre de la Vigne et la formation du langage politique européen (XIIIe-XVe siècle), Rome, École française de Rome, 2008)« Le beau style de la langue de Cola » : un choc émotionnelLa parole désarmante : le politique commence quand cesse la mise à mort (Jean-Claude Milner, Pour une politique des êtres parlants. Court traité politique 2, Lagrasse, 2011)« Il s'habillait comme un véritable tyran d'Asie. Déjà il montrait qu'il voulait par la force gouverner en tyran » : l'habit, le moine et la signature« Alors le tribun commença à se faire haïr » : circulation des affects et rétention corporelleRome, « sa nourriture et sa paralysie » (Jacques Le Goff) : quel miroir de Rome Cola di Rienzo opposait-il à ses concitoyens ?Savoir déchiffrer les reproches que nous font les ruines de la grandeurRenversement, profanation, lisibilité : la Lex de imperio VespasianiEncore les ruines d'Anna Tsing, là où « peut [se] capter la senteur des communs latents et cet arôme d'automne insaisissable »Encore les ruines de Michel Butor : « Chers amis je vous avise du fin fond du Moyen Âge »Des ruines d'avenir, pour ne pas installer l'Apocalypse à demeure« Bientôt, nous dépassions les rues jaunies par l'éclairage dit urbain, et nous rejoignions nos quartiers de prédilection, c'est-à-dire de naufrage » (Antoine Volodine, Des anges mineurs, Paris, 1999)Le Constructive Reenactment de Robin Collingwood (Alain de Libera, L'Archéologie philosophique, Paris, 2016)L'histoire nous fournit un gisement d'énoncés sous forme de solutions, mais à quelles questions ?Anachronime, feinte et agency : rejouer l'histoire (Rémy Besson, « Le reenactment en question : entretien avec Anne Bénichou », www.entre-temps.net)
2/5/2019 • 1 hour, 2 minutes, 1 second
05 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévalesUn renversement archéologique : l'invention de Cola di RienzoQuand Vasari voit en Brunelleschi un voyant davantage qu'un visionnaireL'architecture est une cosa mentale : derrière les ruines, des villes invisibles et des vies potentiellesOptimisme constructif et « caractère destructeur » (Walter Benjamin, 1931) : « s'il met tout ce qui existe en ruine, ce n'est pas pour l'amour des ruines, mais pour le chemin qui se dessine entre elles »Freud, la ville et l'entassement des possibles (Malaise dans la civilisation, 1929) : « si nous voulons traduire dans l'espace la succession historique, nous ne pouvons le faire qu'en plaçant spatialement les choses côte à côte ; la même unité de lieu ne tolère point deux contenus différents »L'épreuve de modernité : les Dialogues des morts de Fontenelle (1683)Bâtir dit l'un, détruire dit l'autre : la mémoire saturée et l'oubli volontaire« Pompéi ne tombe en ruines que maintenant, depuis qu'elle est exhumée » (Freud, « L'homme aux rats »)Cola di Rienzo, piéton accablé des ruines de Rome, face à la violence sociale des barones urbisPassa-t-il « comme un météore ? » (Tommaso di Carpegna Falconieri, Cola di Rienzo, Rome, Salerno, 2002)L'Anonimo romano : la chronique d'une expérience politique (Chronique. Rome, le temps, le monde et la révolte de Cola di Rienzo, éd. et trad. Jacqueline Malherbe-Galy et Jean-Luc Nardone, Toulouse, 2015)Dunqua, da quale novitate comenzaraio ? Nouvelle et nouveauté : quand l'histoire commence, elle a déjà commencéRome, 1325, à hauteur d'un regard d'enfant apeuré« Organiser le peuple » : le paradoxe de la pars populi (Igor Mineo)« Je me tiens à l'écart » : écrire l'histoire pour ne pas percevoir « la guerre et les tourments qui se répandent dans tout le pays»Redresser la chronologie : l'expérience politique de Cola di Rienzo dans le contexte des Regimi di Popolo (Jean-Claude Maire Vigueur, L'autre Rome. Une histoire des Romains à l'époque communale (XIIe-XIVe siècle), Paris, 2010)Senza paura : munitiones, ouverture urbanistique et institutions médiévales de l'apaisementLe dictator et le langage d'apparat de l'ars dictaminis (Benoit Grévin, Rhétorique du pouvoir médiéval. Les Lettres de Pierre de la Vigne et la formation du langage politique européen (XIIIe-XVe siècle), Rome, École française de Rome, 2008)« Le beau style de la langue de Cola » : un choc émotionnelLa parole désarmante : le politique commence quand cesse la mise à mort (Jean-Claude Milner, Pour une politique des êtres parlants. Court traité politique 2, Lagrasse, 2011)« Il s'habillait comme un véritable tyran d'Asie. Déjà il montrait qu'il voulait par la force gouverner en tyran » : l'habit, le moine et la signature« Alors le tribun commença à se faire haïr » : circulation des affects et rétention corporelleRome, « sa nourriture et sa paralysie » (Jacques Le Goff) : quel miroir de Rome Cola di Rienzo opposait-il à ses concitoyens ?Savoir déchiffrer les reproches que nous font les ruines de la grandeurRenversement, profanation, lisibilité : la Lex de imperio VespasianiEncore les ruines d'Anna Tsing, là où « peut [se] capter la senteur des communs latents et cet arôme d'automne insaisissable »Encore les ruines de Michel Butor : « Chers amis je vous avise du fin fond du Moyen Âge »Des ruines d'avenir, pour ne pas installer l'Apocalypse à demeure« Bientôt, nous dépassions les rues jaunies par l'éclairage dit urbain, et nous rejoignions nos quartiers de prédilection, c'est-à-dire de naufrage » (Antoine Volodine, Des anges mineurs, Paris, 1999)Le Constructive Reenactment de Robin Collingwood (Alain de Libera, L'Archéologie philosophique, Paris, 2016)L'histoire nous fournit un gisement d'énoncés sous forme de solutions, mais à quelles questions ?Anachronime, feinte et agency : rejouer l'histoire (Rémy Besson, « Le reenactment en question : entretien avec Anne Bénichou », www.entre-temps.net)
2/5/2019 • 1 hour, 2 minutes, 1 second
04 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévalesLa charpente et l'écharde : retour sur l'étonnement des Japonais face aux missionnaires jésuites« Ils disent aussi qu'il mourut cloué par de mauvais fonctionnaires sur un échafaudage en forme de caractère dix. Comment peut-on appeler maître du Ciel un barbare supplicié ? » (Proclamation faisant suite à l'arrestation de l'association hétérodoxe, 1616 cité par Jacques Gernet, Chine et christianisme. La première confrontation, Paris, 1982)Le pari réussi de Sumitada et l'expérimentation politique des kirishitan daimyô« Le paradoxe du christianisme médiéval comme idéologie est qu'à la fois il sécrète l'écart et permet la résorption de l'écart dans une norme renouvelée […] Ce jeu secrète du doute, de l'insatisfaction, de l'innovation » (Jacques Dalarun, Gouverner c'est servir. Essai de démocratie médiévale, Paris, 2012)L'histoire des sociétés urbaines de l'Italie communale comme « l'histoire d'une capacité de création, d'une possibilité d'altérité » (Élisabeth Crouzet-Pavan, Enfers et paradis. L'Italie de Dante et de Giotto, Paris, 2001)La différence, la répétition et l'esthétisation du pouvoirDes « images-limites » (Jérôme Baschet) aux « situations-limites »« Le champ des énoncés n'est pas un ensemble de plages inertes scandé par des moments féconds ; c'est un domaine qui est de bout en bout actif » (Michel Foucault, L'Archéologie du savoir, Paris, 1969)De la règle de Grandmont aux huit règles d'une grammaire de l'expérimentation politiqueL'aspiration à la règle de vie : toute expérimentation politique est une expérience existentielle (1)Quand il n'y a rien ni personne à commémorer : un lien qui est de répétition, et non de fondation (2)Aiguiser le sens de la communauté (3)Construire le consensus et isoler la pars minor (4)« Les États ne s'ordonneront jamais sans danger » (Machiavel, Discours sur la première décade de Titre-Live) : le lien de division (5)De l'effraction à l'usure : comment durent les institutions (6)La réversibilité des expériences politiques (7) : la réforme de Rancé, poussée à la limite de l'observance monastique« Ce n'est pas la radicalité de la césure que l'utopie établit avec le monde qui donne en tant que telle la mesure de sa portée protestataire ; c'est la capacité qu'elle conserve d'offrir en même temps à la société qui l'environne le témoignage anticipateur d'une alternative plausible » (Danièle Hervieu-Léger, Le Temps des moines. Clôture et hospitalité, Paris, 2017)Une utopie plausible est susceptible de changer d'échelle (8)La notion de scalabilité (Anna Tsing, Le Champignon de la fin du monde. Sur la possibilité de vivre dans les ruines du capitalisme, trad. fr., Paris, 2017)Sur la capacité de ne pas faire d'histoires : les champignons matsutake nichent dans les ruines d'un rêve« L'Occident médiéval est né sur les ruines du monde romain. Il y a trouvé appui et handicap à la fois. Rome a été sa nourriture et sa paralysie » (Jacques Le Goff, La Civilisation de l'Occident médiéval, Paris, 1964)Le temps mis à l'arrêt : « Le monde entier a été par vous Romains transformé en jardin d'agrément » (Ælius Aristide)Pourquoi les choses ne se sont-elles pas passées comme le pensait l'orateur romain ?Le Moyen Âge est un recommencement : « L'histoire recommence du début, mais elle ne se reproduit pas » (Aldo Schiavone, L'Histoire brisée. La Rome antique et l'Occident moderne, trad. fr., Paris, 2003)Milan, 1117 : « l'archevêque et les consuls ont fait installer deux theatra » (Landulf le Jeune, cité par Chris Wickham, Sleepwalking into a New World. The Emergence of Italian City Communes in the Twelfth Century, Princeton, 2015)Rome, 1162 : la rénovation du Sénat et la préservation de la colonne Trajane « tant que durera le monde »Rome, 1431 : l'Urbs fracta « comme un immense cadavre décomposé » (Le Pogge)Humer les « bords broussailleux » des ruines du passé, là où s'invente aussi la capacité des vivants à se fabriquer les uns avec les autres (Anna Tsing)« Mes chers amis. On nous appelle, on crie vers nous, depuis le très grand âge, pour nous dire de ne pas perdre totalement espoir » (Michel Butor, Ruines d'avenir, Arles, 2016).
1/29/2019 • 1 hour, 3 minutes, 18 seconds
04 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévalesLa charpente et l'écharde : retour sur l'étonnement des Japonais face aux missionnaires jésuites« Ils disent aussi qu'il mourut cloué par de mauvais fonctionnaires sur un échafaudage en forme de caractère dix. Comment peut-on appeler maître du Ciel un barbare supplicié ? » (Proclamation faisant suite à l'arrestation de l'association hétérodoxe, 1616 cité par Jacques Gernet, Chine et christianisme. La première confrontation, Paris, 1982)Le pari réussi de Sumitada et l'expérimentation politique des kirishitan daimyô« Le paradoxe du christianisme médiéval comme idéologie est qu'à la fois il sécrète l'écart et permet la résorption de l'écart dans une norme renouvelée […] Ce jeu secrète du doute, de l'insatisfaction, de l'innovation » (Jacques Dalarun, Gouverner c'est servir. Essai de démocratie médiévale, Paris, 2012)L'histoire des sociétés urbaines de l'Italie communale comme « l'histoire d'une capacité de création, d'une possibilité d'altérité » (Élisabeth Crouzet-Pavan, Enfers et paradis. L'Italie de Dante et de Giotto, Paris, 2001)La différence, la répétition et l'esthétisation du pouvoirDes « images-limites » (Jérôme Baschet) aux « situations-limites »« Le champ des énoncés n'est pas un ensemble de plages inertes scandé par des moments féconds ; c'est un domaine qui est de bout en bout actif » (Michel Foucault, L'Archéologie du savoir, Paris, 1969)De la règle de Grandmont aux huit règles d'une grammaire de l'expérimentation politiqueL'aspiration à la règle de vie : toute expérimentation politique est une expérience existentielle (1)Quand il n'y a rien ni personne à commémorer : un lien qui est de répétition, et non de fondation (2)Aiguiser le sens de la communauté (3)Construire le consensus et isoler la pars minor (4)« Les États ne s'ordonneront jamais sans danger » (Machiavel, Discours sur la première décade de Titre-Live) : le lien de division (5)De l'effraction à l'usure : comment durent les institutions (6)La réversibilité des expériences politiques (7) : la réforme de Rancé, poussée à la limite de l'observance monastique« Ce n'est pas la radicalité de la césure que l'utopie établit avec le monde qui donne en tant que telle la mesure de sa portée protestataire ; c'est la capacité qu'elle conserve d'offrir en même temps à la société qui l'environne le témoignage anticipateur d'une alternative plausible » (Danièle Hervieu-Léger, Le Temps des moines. Clôture et hospitalité, Paris, 2017)Une utopie plausible est susceptible de changer d'échelle (8)La notion de scalabilité (Anna Tsing, Le Champignon de la fin du monde. Sur la possibilité de vivre dans les ruines du capitalisme, trad. fr., Paris, 2017)Sur la capacité de ne pas faire d'histoires : les champignons matsutake nichent dans les ruines d'un rêve« L'Occident médiéval est né sur les ruines du monde romain. Il y a trouvé appui et handicap à la fois. Rome a été sa nourriture et sa paralysie » (Jacques Le Goff, La Civilisation de l'Occident médiéval, Paris, 1964)Le temps mis à l'arrêt : « Le monde entier a été par vous Romains transformé en jardin d'agrément » (Ælius Aristide)Pourquoi les choses ne se sont-elles pas passées comme le pensait l'orateur romain ?Le Moyen Âge est un recommencement : « L'histoire recommence du début, mais elle ne se reproduit pas » (Aldo Schiavone, L'Histoire brisée. La Rome antique et l'Occident moderne, trad. fr., Paris, 2003)Milan, 1117 : « l'archevêque et les consuls ont fait installer deux theatra » (Landulf le Jeune, cité par Chris Wickham, Sleepwalking into a New World. The Emergence of Italian City Communes in the Twelfth Century, Princeton, 2015)Rome, 1162 : la rénovation du Sénat et la préservation de la colonne Trajane « tant que durera le monde »Rome, 1431 : l'Urbs fracta « comme un immense cadavre décomposé » (Le Pogge)Humer les « bords broussailleux » des ruines du passé, là où s'invente aussi la capacité des vivants à se fabriquer les uns avec les autres (Anna Tsing)« Mes chers amis. On nous appelle, on crie vers nous, depuis le très grand âge, pour nous dire de ne pas perdre totalement espoir » (Michel Butor, Ruines d'avenir, Arles, 2016).
1/29/2019 • 1 hour, 3 minutes, 18 seconds
03 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
1/22/2019 • 1 hour, 7 minutes, 14 seconds
03 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
1/22/2019 • 1 hour, 7 minutes, 14 seconds
02 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
1/15/2019 • 1 hour, 1 minute, 4 seconds
02 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
1/15/2019 • 1 hour, 1 minute, 4 seconds
01 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
1/8/2019 • 1 hour, 4 minutes, 40 seconds
01 - Les inventions du politique : expérimentations médiévales
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2018-2019Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLes inventions du politique : expérimentations médiévales
1/8/2019 • 1 hour, 4 minutes, 40 seconds
12 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
4/3/2018 • 1 hour, 4 minutes, 14 seconds
12 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
4/3/2018 • 1 hour, 4 minutes, 14 seconds
11 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
3/27/2018 • 1 hour, 6 minutes, 33 seconds
11 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
3/27/2018 • 1 hour, 6 minutes, 33 seconds
10 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
3/20/2018 • 1 hour, 3 minutes, 5 seconds
10 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
3/20/2018 • 1 hour, 3 minutes, 5 seconds
09 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieAutoreprésentation et Bildpolitik : le pape Boniface VIII et l'accusation d'idolâtrie (Agostino Paravicini-Bagliani)Les légistes de Philippe le Bel, « cruels démolisseurs du Moyen Âge » (Michelet) : histoire d'une dissémination symboliqueDu pape Lucius III (m. 1185) à l'archevêque de Milan Ottone Visconti (m. 1295) : le monument funéraire comme expression de la dispute des pouvoirs« Avant même que le siècle ne s'achève, le cheval de Bernabò Visconti se fraya un accès à l'intérieur de l'église » (Erwin Panofsky, La sculpture funéraire, 1992)Nous t'avons vu, Bernabò Visconti : mue seigneuriale et « force de loi » (Jacques Derrida, 1994)Violence conservatrice et violence fondatrice de droit : biffer le nom Bernabò de la généalogie des Visconti ?Fontenelle, Dialogues des morts, 1683 : Erostrate et Démétrios de Phalère. Détruire, dit l'un ; bâtir, dit l'autre« La terre ressemble à de grandes tablettes où chacun veut écrire son nom. Quand ces tablettes sont pleines, il faut bien effacer les noms qui y sont déjà écrits, pour y mettre de nouveaux. Que serait-ce, si tous les monuments des anciens subsistaient ? »La fièvre statuaire de Démétrios de Phalère, le dérèglement du régime des honneurs et la ritualisation de l'outrage aux statues (Vincent Azoulay, « La gloire et l'outrage », Annales HSS, 2009)Les Pasquinades, ou l'éloge oblige des dédicaces parodiques (Faire parler et faire taire les statues, Rome, 2017)La tradition antique des épigrammes latins et les pratiques communales de la dérision : histoires de la vitupération et des vitupérateurs (Jean-Claude Maire Vigueur)Du Jules César de Shakespeare à Hillary Clinton : gouverner en prose, dominer en versLa statue parle : D'oro e d'argento coperto è il barone/Sur un cavallo bello e meraviglioso/E di fin oro si porta sperone/E par pur che sia vivo il valoroso (Matteo da Milano, Lamento funebre du Bernabò Visconti)La valorosa Vipera gentile : développement de la poésie encomiastique autour des ViscontiPourquoi des flatteurs ? Service de légitimation, autonomie et « mise en question critique » (Pierre Bourdieu, Méditations pascaliennes, 1997)Baccio Bracci, Soldan di Banbilonia e ceterà : quand Bernabò, chasseur impénitent, se transforme en loup-garou (per trasmutarlo d'uomo in bestial forma)De l'éloge de Milan à la gloire des Visconti : le Dittamondo de Fazio degli UbertiGiovanni Visconti come vero pastore e vera luce et la vita salvatica de Bernabò Visconti1385, la capture du captivant seigneurAntonio Medin et l'invention du Lamento di Bernabò ViscontiComplaintes, lyrisme et narration (Michael Fœssel, Le temps de la consolation, 2015)Les Lamenti après les Guerres d'Italie : prosopopée populaire et culture politique italienne (Florence Alazard, Le lamento dans l'Italie de la Renaissance, 2010)Toujours le Lamento di Bernabò Visconti : composition et codicologie (Marco Limongelli)Force et justice dans la « triste aventure » de Bernabò : de maiore sangue è manifesto/fe granda iustitia, como se rexonaUn buongoverno de la seigneurie ? Le précédent de l'éloge funéraire de Giovanni Visconti par Gabriele Zamorei da Parma, felicis domini, magnusque potensque tyrampnus (Andrea Gamberini, « Orgogliosamente tiranni », dans Andrea Zorzi dir., Tiranni e tirannide nel Trecento italiano, 2013)La requalification juridique de la notion de tyrannie d'après Bartolo da Sassoferrato (Diego Quaglioni)Les Florentins doivent-ils fêter la mort de Bernabò Visconti ? Les dilemmes de Coluccio Salutati et les ambiguïtés de la florentina libertasLes féroces chansons de Franco Sacchetti contre Bernabò Visconti : Più che Nembrot superbo, e più crudele/che non fu mai Galicola o NeroneNemrod, le pouvoir cynégétique et l'envers monstrueux du pouvoir pastoral (Grégoire Chamayou, Les chasses à l'homme, 2010)« Bien qu'il fut cruel, il y avait dans ses cruautés une grande part de justice » : Franco Sacchetti et la novellisation de Bernabò Visconti.
3/13/2018 • 1 hour, 3 minutes, 12 seconds
09 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieAutoreprésentation et Bildpolitik : le pape Boniface VIII et l'accusation d'idolâtrie (Agostino Paravicini-Bagliani)Les légistes de Philippe le Bel, « cruels démolisseurs du Moyen Âge » (Michelet) : histoire d'une dissémination symboliqueDu pape Lucius III (m. 1185) à l'archevêque de Milan Ottone Visconti (m. 1295) : le monument funéraire comme expression de la dispute des pouvoirs« Avant même que le siècle ne s'achève, le cheval de Bernabò Visconti se fraya un accès à l'intérieur de l'église » (Erwin Panofsky, La sculpture funéraire, 1992)Nous t'avons vu, Bernabò Visconti : mue seigneuriale et « force de loi » (Jacques Derrida, 1994)Violence conservatrice et violence fondatrice de droit : biffer le nom Bernabò de la généalogie des Visconti ?Fontenelle, Dialogues des morts, 1683 : Erostrate et Démétrios de Phalère. Détruire, dit l'un ; bâtir, dit l'autre« La terre ressemble à de grandes tablettes où chacun veut écrire son nom. Quand ces tablettes sont pleines, il faut bien effacer les noms qui y sont déjà écrits, pour y mettre de nouveaux. Que serait-ce, si tous les monuments des anciens subsistaient ? »La fièvre statuaire de Démétrios de Phalère, le dérèglement du régime des honneurs et la ritualisation de l'outrage aux statues (Vincent Azoulay, « La gloire et l'outrage », Annales HSS, 2009)Les Pasquinades, ou l'éloge oblige des dédicaces parodiques (Faire parler et faire taire les statues, Rome, 2017)La tradition antique des épigrammes latins et les pratiques communales de la dérision : histoires de la vitupération et des vitupérateurs (Jean-Claude Maire Vigueur)Du Jules César de Shakespeare à Hillary Clinton : gouverner en prose, dominer en versLa statue parle : D'oro e d'argento coperto è il barone/Sur un cavallo bello e meraviglioso/E di fin oro si porta sperone/E par pur che sia vivo il valoroso (Matteo da Milano, Lamento funebre du Bernabò Visconti)La valorosa Vipera gentile : développement de la poésie encomiastique autour des ViscontiPourquoi des flatteurs ? Service de légitimation, autonomie et « mise en question critique » (Pierre Bourdieu, Méditations pascaliennes, 1997)Baccio Bracci, Soldan di Banbilonia e ceterà : quand Bernabò, chasseur impénitent, se transforme en loup-garou (per trasmutarlo d'uomo in bestial forma)De l'éloge de Milan à la gloire des Visconti : le Dittamondo de Fazio degli UbertiGiovanni Visconti come vero pastore e vera luce et la vita salvatica de Bernabò Visconti1385, la capture du captivant seigneurAntonio Medin et l'invention du Lamento di Bernabò ViscontiComplaintes, lyrisme et narration (Michael Fœssel, Le temps de la consolation, 2015)Les Lamenti après les Guerres d'Italie : prosopopée populaire et culture politique italienne (Florence Alazard, Le lamento dans l'Italie de la Renaissance, 2010)Toujours le Lamento di Bernabò Visconti : composition et codicologie (Marco Limongelli)Force et justice dans la « triste aventure » de Bernabò : de maiore sangue è manifesto/fe granda iustitia, como se rexonaUn buongoverno de la seigneurie ? Le précédent de l'éloge funéraire de Giovanni Visconti par Gabriele Zamorei da Parma, felicis domini, magnusque potensque tyrampnus (Andrea Gamberini, « Orgogliosamente tiranni », dans Andrea Zorzi dir., Tiranni e tirannide nel Trecento italiano, 2013)La requalification juridique de la notion de tyrannie d'après Bartolo da Sassoferrato (Diego Quaglioni)Les Florentins doivent-ils fêter la mort de Bernabò Visconti ? Les dilemmes de Coluccio Salutati et les ambiguïtés de la florentina libertasLes féroces chansons de Franco Sacchetti contre Bernabò Visconti : Più che Nembrot superbo, e più crudele/che non fu mai Galicola o NeroneNemrod, le pouvoir cynégétique et l'envers monstrueux du pouvoir pastoral (Grégoire Chamayou, Les chasses à l'homme, 2010)« Bien qu'il fut cruel, il y avait dans ses cruautés une grande part de justice » : Franco Sacchetti et la novellisation de Bernabò Visconti.
3/13/2018 • 1 hour, 3 minutes, 12 seconds
08 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieDu passé, nous sommes séparés, alors pourquoi écrire l'histoire ? (Levent Yilmaz, Le temps moderne, 2014)Le point de bascule machiavélien du chapitre 15 : « aussi est-il nécessaire à un prince, s'il veut se maintenir, d'apprendre à pouvoir ne pas être bon et d'un user et de n'en pas user, selon la nécessité »Du De principatibus au Prince, de la typologie de la production sociale des états à l'anthropologie de l'exercice du pouvoirEntre les anciens et les modernes, entre « la continuelle lecture des antiques » et « l'expérience des choses modernes », le passé moyenL'irruption d'un nom : « Il est aussi très avantageux pour un prince de donner de rares exemples de lui-même pour le gouvernement des choses du dedans (a' governi di dentro) — semblables à ceux que l'on raconte à propos de messire Bernabò de Milan ; quand il en a l'occasion, lorsque quelqu'un fait quelque chose d'extraordinaire, ou en bien ou en mal, dans la vie civile, il doit choisir une façon de le récompenser ou de le punir dont on sera amené à beaucoup parler »On raconte qu'il savait faire parler de lui : le hors-champ narratif de la novellisticaGrands hommes et uomini grandi : dans les Histoires florentines, « messire Bernabò » nomme le temps moyen de l'action politiqueUne étude de cas classique ? Tenter d'approcher une figure historique pour prendre la mesure de ses reconfigurations par la fiction politiqueDévisager le tyran, 1 : de quelle profonde entaille se creuse le sourire de Cangrande della Scala ? Dévisager le tyran, 2 : droit, sévère, majestueux et martial, Bernabò Visconti sculpté par Bonino da CampioneMonuments funéraires et triomphes politiques, ou l'axe Milan-VéroneL'enracinement dynastique, le blason et le portrait (Hans Belting)La biscione des Visconti : la guivre et l'horizon onirique de la croisade (Paolo Zaninetta, Il potere raffigurato, 2013)Du serpent à la vipère : histoire d'une mue symboliqueLa vipera che i Melanesi accampa (Dante, Purg, VIII, 80), l'enfant recraché ou avalé : encore le pouvoir cannibaleLes serpentina machinatione du sens, ou la politique ondoyante des MilanaisSouffrir m'estuet : animal totémique et devise de Bernabò Visconti (Laurent Hablot)À la tête d'une cavalcade seigneuriale, de l'effigie équestre du podestat Oldrado di Tresseno (1233) à la statue perdue d'Azzone Visconti, seigneur de Milan (1329-1339)Chevaux modernes, chevaux antiques : le Regisole de Pavie, « une statue équestre en bronze recouverte d'or, au sommet du forum, qui semble gravir à vive allure le sommet de la colline » (Pétrarque, Seniles, 5, 1)Le cheval de Bernabò, un « portrait de museau » (Armelle Fémelat)L'enluminure lombarde et le traitement naturaliste du réel : du Tacuinum sanitatis (BnF, Nouv. acq. lat. 1673) au Guiron le courtois (BnF, Nouv. acq. fr. 5243)Le mécénat de Bernabò Visconti et la culture courtoise européenne (Kay Sutton)Charles Borromée face au monument funéraire de Bernabò Visconti dans l'église San Giovanni in Conca en 1567 : le tombeau comme provocationSon lieu : la rocca seigneuriale en tant que recinto sacro, brève histoire d'une transgression urbanistiqueL'incertaine mémoire topographique de la Cà di can, palais de Bernabò Visconti à MilanUne reconstitution archivistique et archéologique de l'implantation palatiale des Visconti à Milan : la morsure seigneuriale (Edoardo Rossetti, « In "contrata de Vicecomitibus"… », dans Pier Nicola Pagliara et Serena Romano dir. Modernamente anichi…, Rome, 2014)Pietro Azario, Chronicon de gestis principum Vicecomitum (avant 1363) « […] ac a lateribus stipatum, statuis referentibus eius iustitiam et fortitudinem, quibus virtutibus innixus regit ; eamque statuam locauit in superficie altaris maioris »Galeazzo II et Bernabò Visconti, deux styles de gouvernement : par la norme et par la grâce (Andrea Gamberini, La città assediata, Rome, 2003)Plenitudo potestatis ou plenitudo honestatis ? (Nadia Covini, "La balanza dritta", Milan, 2007)Force de loi : les deux allégories féminines de la force et de la justice sont moins en tension qu'en soutienNon pas une étude de cas, mais l'étude d'un cas.
3/6/2018 • 1 hour, 2 minutes, 23 seconds
08 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieDu passé, nous sommes séparés, alors pourquoi écrire l'histoire ? (Levent Yilmaz, Le temps moderne, 2014)Le point de bascule machiavélien du chapitre 15 : « aussi est-il nécessaire à un prince, s'il veut se maintenir, d'apprendre à pouvoir ne pas être bon et d'un user et de n'en pas user, selon la nécessité »Du De principatibus au Prince, de la typologie de la production sociale des états à l'anthropologie de l'exercice du pouvoirEntre les anciens et les modernes, entre « la continuelle lecture des antiques » et « l'expérience des choses modernes », le passé moyenL'irruption d'un nom : « Il est aussi très avantageux pour un prince de donner de rares exemples de lui-même pour le gouvernement des choses du dedans (a' governi di dentro) — semblables à ceux que l'on raconte à propos de messire Bernabò de Milan ; quand il en a l'occasion, lorsque quelqu'un fait quelque chose d'extraordinaire, ou en bien ou en mal, dans la vie civile, il doit choisir une façon de le récompenser ou de le punir dont on sera amené à beaucoup parler »On raconte qu'il savait faire parler de lui : le hors-champ narratif de la novellisticaGrands hommes et uomini grandi : dans les Histoires florentines, « messire Bernabò » nomme le temps moyen de l'action politiqueUne étude de cas classique ? Tenter d'approcher une figure historique pour prendre la mesure de ses reconfigurations par la fiction politiqueDévisager le tyran, 1 : de quelle profonde entaille se creuse le sourire de Cangrande della Scala ? Dévisager le tyran, 2 : droit, sévère, majestueux et martial, Bernabò Visconti sculpté par Bonino da CampioneMonuments funéraires et triomphes politiques, ou l'axe Milan-VéroneL'enracinement dynastique, le blason et le portrait (Hans Belting)La biscione des Visconti : la guivre et l'horizon onirique de la croisade (Paolo Zaninetta, Il potere raffigurato, 2013)Du serpent à la vipère : histoire d'une mue symboliqueLa vipera che i Melanesi accampa (Dante, Purg, VIII, 80), l'enfant recraché ou avalé : encore le pouvoir cannibaleLes serpentina machinatione du sens, ou la politique ondoyante des MilanaisSouffrir m'estuet : animal totémique et devise de Bernabò Visconti (Laurent Hablot)À la tête d'une cavalcade seigneuriale, de l'effigie équestre du podestat Oldrado di Tresseno (1233) à la statue perdue d'Azzone Visconti, seigneur de Milan (1329-1339)Chevaux modernes, chevaux antiques : le Regisole de Pavie, « une statue équestre en bronze recouverte d'or, au sommet du forum, qui semble gravir à vive allure le sommet de la colline » (Pétrarque, Seniles, 5, 1)Le cheval de Bernabò, un « portrait de museau » (Armelle Fémelat)L'enluminure lombarde et le traitement naturaliste du réel : du Tacuinum sanitatis (BnF, Nouv. acq. lat. 1673) au Guiron le courtois (BnF, Nouv. acq. fr. 5243)Le mécénat de Bernabò Visconti et la culture courtoise européenne (Kay Sutton)Charles Borromée face au monument funéraire de Bernabò Visconti dans l'église San Giovanni in Conca en 1567 : le tombeau comme provocationSon lieu : la rocca seigneuriale en tant que recinto sacro, brève histoire d'une transgression urbanistiqueL'incertaine mémoire topographique de la Cà di can, palais de Bernabò Visconti à MilanUne reconstitution archivistique et archéologique de l'implantation palatiale des Visconti à Milan : la morsure seigneuriale (Edoardo Rossetti, « In "contrata de Vicecomitibus"… », dans Pier Nicola Pagliara et Serena Romano dir. Modernamente anichi…, Rome, 2014)Pietro Azario, Chronicon de gestis principum Vicecomitum (avant 1363) « […] ac a lateribus stipatum, statuis referentibus eius iustitiam et fortitudinem, quibus virtutibus innixus regit ; eamque statuam locauit in superficie altaris maioris »Galeazzo II et Bernabò Visconti, deux styles de gouvernement : par la norme et par la grâce (Andrea Gamberini, La città assediata, Rome, 2003)Plenitudo potestatis ou plenitudo honestatis ? (Nadia Covini, "La balanza dritta", Milan, 2007)Force de loi : les deux allégories féminines de la force et de la justice sont moins en tension qu'en soutienNon pas une étude de cas, mais l'étude d'un cas.
3/6/2018 • 1 hour, 2 minutes, 23 seconds
07 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieLes fake news sont de fausses nouvelles : premier bilan d'étapeLa circulation des fictions transmédiatiques et la novellisation (Matthieu Letourneux, Fictions à la chaine. Littératures sérielles et culture médiatique, 2017)Ceux qui gagnent (The West Wing), ceux qui perdent (The Wire) : en quoi la fiction politique est-elle politique ?La Novellisation, « genre contaminée » (Jan Baetens, Poétique, 2004) : produits dérivés, auctorialité dégradéeNovella, jeune pousse et avvenimenti : l'événement est ce qui advient à ce qui est advenu (Pierre Laborie)La fiction politique éclaire l'actualité, c'est-à-dire ce que nous sommes en train de devenir« Que porai-je de nouvel dire ? » (Froissart, Froissart Le Joli Buisson de Jonece) : la tristesse du déjà-dit (Jacqueline Cerquiglini-Toulet, La couleur de la mélancolie. La fréquentation des livres au XIVe siècle, 1991)Nouvelle, cri, rumeur et clameur : quand le jeune plant renouvelle le champ de la littérature (Nelly Labère, Défricher le jeune plant. Étude du genre de la nouvelle au Moyen Âge, 2006)Quatre impératifs pour la nouvelle : vérité, exemplarité, oralité, actualitéRéactualiser la fraiche mémoire, dévoiler l'obscèneDes Cent Nouvelles Nouvelles bourguignonnes (1462) à l'Heptaméron de Marguerite de Navarre (1545), ou comment désenchanter le grand récit de la Renaissance françaiseCe qui fait le genre : migrations textuelles (Roger Chartier) et architextualité (Gérard Genette), le cas des Mystères urbainsQu'est-ce qu'une chute ? La production du novusBoccace et les formes médiévales de la brevitas : Cento novelle, o favole o parabole o istorie che dire le vogliamo« Ce sont donc les hommes de condition moyenne (di mezzano stato) qui seront notre objet » (Francesco Bonciani, Leçon sur la composition des nouvelles, 1574)Le motto comme facétie ascendante, la beffa comme farce condescendanteLe fourreur Ganfo dans la nouvelle de Sercambi, ou la fragilité ontologique des faibles : Va via, tu se' mortoLe survivant au pouvoir : la novellisation des dominants comme une altération qui n'affaiblit pasUne ascension sociale contrariée, puis châtiée : le cas de Giovanni Gherardi da Prato, novelliere novelliséLe passé sédimenté du Paradis des Alberti : 1425, 1389, 1350, 1258« Aujourd'hui, ces seigneurs sont devenus des tyrans cruels » (Décaméron, X, 7)« Il n'est pas utile de raconter ce qu'il en fut de la venimeuse et pestifère rage qui dressa les Guelfes contre les Gibelins dans les temps passés, puisque, de nos jours encore, on peut voir, à travers toute l'Italie, les traces et les vestiges… » (Giovanni Gherardi da Prato, Le Paradis des Alberti)L'acquettino, ou l'insurrection poétique contre l'humanisme civique (Antonio Lanza, Polemiche e berte letterarie nella Firenze del primo Quattrocento, 1971)« Car ça commence toujours avant… » : le Novellino, ou Libro di novelle e di bel parlar gentileLa profondeur du temps passé, l'horizon rêvé du bon gouvernementPotente imperadore Federigo : deux Frédéric, un seul spectre impérial« Dire combien il fut craint serait une grande affaire : bien des gens le savent » (Novellino, 84), Ezzelino da Romano, ou les origines sanglantes et grotesques de la tyrannie« Messire Ezzelino avait à son service un conteur auquel il faisait conter des histoires pendant des longues nuits d'hiver » (Novellino, 31)Walter Benjamin, « Le conteur » (1936), et la chute du cours de l'expérience : chaque information n'a de valeur « qu'à l'instant où elle est nouvelle » mais il n'en est pas de même du récit, « il ne se livre pas »Une lecture poétique et politique de Dante, Ossip Mandelstam et le chant 33 de l'Enfer, « …une de ces délicieuses horreurs qu'on se marmonne avec contentement… »Les deux agonies d'Ugolin, ou l'indétermination du politique : « dans les ténèbres de la tour de la Faim, Ugolin dévore ou ne dévore pas tous ses cadavres aimés, et cette oscillante imprécision, cette incertitude, est l'étrange matière dont il est fait. Ainsi l'a rêvé Dante, avec deux agonies possibles, et ainsi le rêveront des générations à venir » (Borgès, Neuf essais sur Dante)Machiavel, lui aussi, face à l'indétermination des temps : frapper les esprits par quelques « rares exemples de lui-même, semblables à ceux que l'on raconte à propos de messire Bernabò de Milan » (Le Prince, 21).
2/20/2018 • 1 hour, 4 minutes, 23 seconds
07 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieLes fake news sont de fausses nouvelles : premier bilan d'étapeLa circulation des fictions transmédiatiques et la novellisation (Matthieu Letourneux, Fictions à la chaine. Littératures sérielles et culture médiatique, 2017)Ceux qui gagnent (The West Wing), ceux qui perdent (The Wire) : en quoi la fiction politique est-elle politique ?La Novellisation, « genre contaminée » (Jan Baetens, Poétique, 2004) : produits dérivés, auctorialité dégradéeNovella, jeune pousse et avvenimenti : l'événement est ce qui advient à ce qui est advenu (Pierre Laborie)La fiction politique éclaire l'actualité, c'est-à-dire ce que nous sommes en train de devenir« Que porai-je de nouvel dire ? » (Froissart, Froissart Le Joli Buisson de Jonece) : la tristesse du déjà-dit (Jacqueline Cerquiglini-Toulet, La couleur de la mélancolie. La fréquentation des livres au XIVe siècle, 1991)Nouvelle, cri, rumeur et clameur : quand le jeune plant renouvelle le champ de la littérature (Nelly Labère, Défricher le jeune plant. Étude du genre de la nouvelle au Moyen Âge, 2006)Quatre impératifs pour la nouvelle : vérité, exemplarité, oralité, actualitéRéactualiser la fraiche mémoire, dévoiler l'obscèneDes Cent Nouvelles Nouvelles bourguignonnes (1462) à l'Heptaméron de Marguerite de Navarre (1545), ou comment désenchanter le grand récit de la Renaissance françaiseCe qui fait le genre : migrations textuelles (Roger Chartier) et architextualité (Gérard Genette), le cas des Mystères urbainsQu'est-ce qu'une chute ? La production du novusBoccace et les formes médiévales de la brevitas : Cento novelle, o favole o parabole o istorie che dire le vogliamo« Ce sont donc les hommes de condition moyenne (di mezzano stato) qui seront notre objet » (Francesco Bonciani, Leçon sur la composition des nouvelles, 1574)Le motto comme facétie ascendante, la beffa comme farce condescendanteLe fourreur Ganfo dans la nouvelle de Sercambi, ou la fragilité ontologique des faibles : Va via, tu se' mortoLe survivant au pouvoir : la novellisation des dominants comme une altération qui n'affaiblit pasUne ascension sociale contrariée, puis châtiée : le cas de Giovanni Gherardi da Prato, novelliere novelliséLe passé sédimenté du Paradis des Alberti : 1425, 1389, 1350, 1258« Aujourd'hui, ces seigneurs sont devenus des tyrans cruels » (Décaméron, X, 7)« Il n'est pas utile de raconter ce qu'il en fut de la venimeuse et pestifère rage qui dressa les Guelfes contre les Gibelins dans les temps passés, puisque, de nos jours encore, on peut voir, à travers toute l'Italie, les traces et les vestiges… » (Giovanni Gherardi da Prato, Le Paradis des Alberti)L'acquettino, ou l'insurrection poétique contre l'humanisme civique (Antonio Lanza, Polemiche e berte letterarie nella Firenze del primo Quattrocento, 1971)« Car ça commence toujours avant… » : le Novellino, ou Libro di novelle e di bel parlar gentileLa profondeur du temps passé, l'horizon rêvé du bon gouvernementPotente imperadore Federigo : deux Frédéric, un seul spectre impérial« Dire combien il fut craint serait une grande affaire : bien des gens le savent » (Novellino, 84), Ezzelino da Romano, ou les origines sanglantes et grotesques de la tyrannie« Messire Ezzelino avait à son service un conteur auquel il faisait conter des histoires pendant des longues nuits d'hiver » (Novellino, 31)Walter Benjamin, « Le conteur » (1936), et la chute du cours de l'expérience : chaque information n'a de valeur « qu'à l'instant où elle est nouvelle » mais il n'en est pas de même du récit, « il ne se livre pas »Une lecture poétique et politique de Dante, Ossip Mandelstam et le chant 33 de l'Enfer, « …une de ces délicieuses horreurs qu'on se marmonne avec contentement… »Les deux agonies d'Ugolin, ou l'indétermination du politique : « dans les ténèbres de la tour de la Faim, Ugolin dévore ou ne dévore pas tous ses cadavres aimés, et cette oscillante imprécision, cette incertitude, est l'étrange matière dont il est fait. Ainsi l'a rêvé Dante, avec deux agonies possibles, et ainsi le rêveront des générations à venir » (Borgès, Neuf essais sur Dante)Machiavel, lui aussi, face à l'indétermination des temps : frapper les esprits par quelques « rares exemples de lui-même, semblables à ceux que l'on raconte à propos de messire Bernabò de Milan » (Le Prince, 21).
2/20/2018 • 1 hour, 4 minutes, 23 seconds
06 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie« La fresque est tombée en cet endroit et je ne serais qu'un plat romancier […] si j'entreprenais d'y suppléer » (Stendhal, La vie d'Henry Brulard)Le « Triomphe de la mort » du Camposanto de Pise, « leçon de ténèbres »Buffalmacco, l'auteur retrouvé : un personnage avant d'être un créateur (Luciano Bellosi)De l'art de convertir un déclassement en « fronde expressionniste » (Enrico Castelnuovo et Carlo Ginzburg, « Domination symbolique et géographie artistique dans l'histoire de l'art italien », Actes de la recherche en science sociale, 1981)« Traverser l'effroi », à rebours : on n'y voit moins le « sentiment de culpabilité » d'après 1348 (Millard Meiss) que « l'inculpation généralisée » (Pierre Legendre)Le royaume de Satan et l'Enfer de Dante : quand la justice des hommes anticipe le Jugement dernier (Jérôme Baschet, Les justices de l'au-delà, Rome, 1993)Trois contemporains, Buffalmacco, Lorenzetti et Villani : la timor et « L'angoscia delle repubbliche » (Andrea Zorzi)Le seigneur est mortel, la seigneurie n'est ni certaine, ni fatale, ni définitive : Castruccio Castacani parmi les beaux jeunes gens frappés par la faucheuseMémoire fictionnelle, oubli historique : quand un souvenir se substitue à un autreBuffalmacco et Bruno, « compagnons inséparables » (Décameron, VIII, 9) contre Calandrino « bonhomme simplet et fantasque (Décameron, VIII, 3)« Buonamico, fils de Cristofano, dit Buffalmacco, peintre florentin, élève d'Andrea Tafi, doit au Décameron de Boccace sa célébrité de bon plaisant » (Giorgio Vasari, Le Vite…, 1568)Vasari novelliere et Vincenzo Borghini : « d'après ce que nous en dit Franco Sacchetti »Guido Tarlati et son singe : l'imitateur imité, l'inversion des signesLe Massacre des innocents de Buffalmacco, ou la transsubstantiation par la peinture (Norman Land, Renaissance Quaterly, 2005)Lire les Vite de Vasari comme un texte littéraire pour restaurer sa capacité de description sociale (Paul Barolsky, Why Mona Lisa Smiles and Other Tales by Vasari, 1993)Déplacer l'enquête vers l'individuation et la sociologie implicite (Jacques Dubois, Le roman de Gilberte Swann. Proust sociologue paradoxal, 2018)L'exercice des métiers dans la novellistica : l'ouvrier Agnolo chez Sacchetti et le briquetier Grillo chez SercambiUne burla de Buffalmacco : le peintre et ses voisins bruyants dans le Trecentonovelle« Buonamicco était peintre à son compte et désireux de dormir ou de veiller en choisissant son temps, car il entendait exercer son art, maintenant qu'il était son propre maître, autrement que quand il était disciple, sous les ordres d'autrui »L'oisiveté créatrice de Léonard de Vinci d'après les Novelle de Matteo BandelloGiotto beffatore : « Pour sûr, je vais lui faire des armes à ma façon » (Sacchetti, nouvelle 63)Le peintre, le juge, l'orage : un lessivage des apparences (Décameron, VI, 5)« Il novelliere "en artiste" » (Marcello Ciccuto) : rendre visible la vérité par le récit ordonné d'une storiaLa Novella del Grasso Legnaiuolo, ou la brigata des artistesQui est le Gros ? La consistance historique d'une réussite fictionnelleLa folie du Grasso et le triomphe de Brunelleschi« Tu désires, Girolamo, être informé sur le Filippo qui fit cette farce à Grasso, parce que tu l'admires tellement quand je te dis que c'est une histoire vraie » : Antonio Manetti et la biographie de Brunelleschi (1485)Quand la fable littéraire vient garantir le régime de véridicité d'une Vita : « afin que tu lises la nouvelle comme un récit véridique et non comme un de ces contes qui pullulent »Nouvelles de la tyrannie : « Le sujet idéal de la domination totalitaire n'est ni le nazi convaincu ni le communiste convaincu, mais les gens pour qui la distinction entre fait et fiction (c'est-à-dire la réalité de l'expérience) et la distinction entre vrai et faux (c'est-à-dire les normes de la pensée) n'existent plus » (Hannah Arendt, Le système totalitaire, 1951).
2/13/2018 • 1 hour, 4 minutes, 11 seconds
06 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie« La fresque est tombée en cet endroit et je ne serais qu'un plat romancier […] si j'entreprenais d'y suppléer » (Stendhal, La vie d'Henry Brulard)Le « Triomphe de la mort » du Camposanto de Pise, « leçon de ténèbres »Buffalmacco, l'auteur retrouvé : un personnage avant d'être un créateur (Luciano Bellosi)De l'art de convertir un déclassement en « fronde expressionniste » (Enrico Castelnuovo et Carlo Ginzburg, « Domination symbolique et géographie artistique dans l'histoire de l'art italien », Actes de la recherche en science sociale, 1981)« Traverser l'effroi », à rebours : on n'y voit moins le « sentiment de culpabilité » d'après 1348 (Millard Meiss) que « l'inculpation généralisée » (Pierre Legendre)Le royaume de Satan et l'Enfer de Dante : quand la justice des hommes anticipe le Jugement dernier (Jérôme Baschet, Les justices de l'au-delà, Rome, 1993)Trois contemporains, Buffalmacco, Lorenzetti et Villani : la timor et « L'angoscia delle repubbliche » (Andrea Zorzi)Le seigneur est mortel, la seigneurie n'est ni certaine, ni fatale, ni définitive : Castruccio Castacani parmi les beaux jeunes gens frappés par la faucheuseMémoire fictionnelle, oubli historique : quand un souvenir se substitue à un autreBuffalmacco et Bruno, « compagnons inséparables » (Décameron, VIII, 9) contre Calandrino « bonhomme simplet et fantasque (Décameron, VIII, 3)« Buonamico, fils de Cristofano, dit Buffalmacco, peintre florentin, élève d'Andrea Tafi, doit au Décameron de Boccace sa célébrité de bon plaisant » (Giorgio Vasari, Le Vite…, 1568)Vasari novelliere et Vincenzo Borghini : « d'après ce que nous en dit Franco Sacchetti »Guido Tarlati et son singe : l'imitateur imité, l'inversion des signesLe Massacre des innocents de Buffalmacco, ou la transsubstantiation par la peinture (Norman Land, Renaissance Quaterly, 2005)Lire les Vite de Vasari comme un texte littéraire pour restaurer sa capacité de description sociale (Paul Barolsky, Why Mona Lisa Smiles and Other Tales by Vasari, 1993)Déplacer l'enquête vers l'individuation et la sociologie implicite (Jacques Dubois, Le roman de Gilberte Swann. Proust sociologue paradoxal, 2018)L'exercice des métiers dans la novellistica : l'ouvrier Agnolo chez Sacchetti et le briquetier Grillo chez SercambiUne burla de Buffalmacco : le peintre et ses voisins bruyants dans le Trecentonovelle« Buonamicco était peintre à son compte et désireux de dormir ou de veiller en choisissant son temps, car il entendait exercer son art, maintenant qu'il était son propre maître, autrement que quand il était disciple, sous les ordres d'autrui »L'oisiveté créatrice de Léonard de Vinci d'après les Novelle de Matteo BandelloGiotto beffatore : « Pour sûr, je vais lui faire des armes à ma façon » (Sacchetti, nouvelle 63)Le peintre, le juge, l'orage : un lessivage des apparences (Décameron, VI, 5)« Il novelliere "en artiste" » (Marcello Ciccuto) : rendre visible la vérité par le récit ordonné d'une storiaLa Novella del Grasso Legnaiuolo, ou la brigata des artistesQui est le Gros ? La consistance historique d'une réussite fictionnelleLa folie du Grasso et le triomphe de Brunelleschi« Tu désires, Girolamo, être informé sur le Filippo qui fit cette farce à Grasso, parce que tu l'admires tellement quand je te dis que c'est une histoire vraie » : Antonio Manetti et la biographie de Brunelleschi (1485)Quand la fable littéraire vient garantir le régime de véridicité d'une Vita : « afin que tu lises la nouvelle comme un récit véridique et non comme un de ces contes qui pullulent »Nouvelles de la tyrannie : « Le sujet idéal de la domination totalitaire n'est ni le nazi convaincu ni le communiste convaincu, mais les gens pour qui la distinction entre fait et fiction (c'est-à-dire la réalité de l'expérience) et la distinction entre vrai et faux (c'est-à-dire les normes de la pensée) n'existent plus » (Hannah Arendt, Le système totalitaire, 1951).
2/13/2018 • 1 hour, 4 minutes, 11 seconds
05 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie« Malheureusement, les hommes généreux pour lesquels ces choses avaient été écrites en de meilleurs temps avaient désormais abandonné les arts libéraux aux plébéiens » (lettre du pseudo-Ilario à Uguccione della Faggiola)L'expérience seigneuriale : régularités structurelles, grammaire politique, contextes locauxÀ Pise : une histoire discontinue et graduelleLe Zibaldone Laurenziano et la « leggenda dantesca del Boccacio », (Giuseppe Billanovitch)Boccace et le Trattatello in laude di Dante : aimer dans la Comédie « la richesse du texte en artifices, la multitude des histoires, la sublimité des sens cachés sous le voile poétique »La légende de la triple dédicace (l'Enfer à Uguccione della Faggiola, le Purgatoire à Moroello Malaspina, le Paradis à Frédéric II) : les raisons politiques d'une fiction littéraireLe bivium : Albertino Mussato et Dante en 1311 et en 1316Cangrande della Scala d'après Giovanni Villani : questi fu il maggior tiranno e 'll più possente e ricco che fosse in Lombardia da Azzolino da Romano infino allora (X, 138), valente tiranno e signore da bene […] e amico del nostro Comune (X, 95)Coup de force poétique, transgression politique et privilegium : « En effet, ceux qui puisent leurs forces dans l'intellect et dans la raison et qui ont reçu le don divin de la liberté ne sont assujettis à aucun usage ; et il ne faut pas s'en étonner, car ils ne sont pas inspirés par les lois, mais ce sont eux qui inspirent les lois » (Dante, Épître à Cangrande dalla Scala)« Tandis que je lisais ces phrases, j'ai cru entendre la voix de Boccaccio qui murmurait à mon oreille : "Ser Ciappelletto, c'est moi" » (Carlo Ginzburg, « L'épître à Cangrande et ses deux auteurs », Po&sie, 2008)Vie et mœurs de François Pétrarque, florentin : histoires d'admiration et de rivalité (1343-1353)Pétrarque à Milan, Auri sacra fames (Enéide, III, 57)Lettre de Pétrarque à Boccace (Familiares, XXI, 15 : mai 1359)« Ils mentent donc ceux qui disent que je cherche à diminuer sa renommée »Un moment de vérité : « Et qui enfin peut envier celui qui n'envie pas Virgile, à moins que lui envie les applaudissements et les rauques clameurs des foulons, des gargotiers et des saltimbanques (fullonum et cauponum et lanistarum) et de tous ces gens dont la louange constitue en réalité une offense, au point que je me félicite, avec Virgile lui-même et Homère, de m'en trouver privé : je sais bien ce que vaut auprès des personnes cultivées l'éloge des incultes »Pétrarque, La Vie solitaire et l'art du placement (Étienne Anheim)De la haine du peuple à la haine des intellectuels : « Ce sont eux qui promènent par toute la ville, comme un vieux bibelot à vendre, leur sottise cultivée »Les lettres à la postérité (Familiares, XXIV) comme fiction politique : « Mais quel délire t'a poussé contre Antoine ? L'amour de la République, je crois, que tu reconnaissais s'être déjà écroulée de fond en comble » (Pétrarque à Cicéron)Négocier avec ses précurseurs lointains, préfigurer la politique à venir : la curialisation de l'exercice du gouvernement au QuattrocentoL'impossible portrait de groupe des auteurs de la novellistica toscane et la déstabilisation de la fonction auteur : de Gentile Sermini au pseudo-Sermini (Monica Marchi)Franco Sacchetti pendant la « Guerre des Huit Saints » (1375-1378) : Florence defensor libertatisIo scrittor : écrire, recueillir et composer le TrecentonovelleFranco Sacchetti, l'engagement civique et les frustrations d'une carrière politique : la canaille littéraire des « Rousseau du ruisseau » ?À l'inverse, Giovanni Sercambi et le buon governo de la seigneurieVendre la mèche : engagement sartrien, déclassement social et aspiration à une aristocratie fictive (Ronan de Calan, La littérature pure. Histoire d'un déclassement, 2017).
2/6/2018 • 1 hour, 3 minutes, 43 seconds
05 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie« Malheureusement, les hommes généreux pour lesquels ces choses avaient été écrites en de meilleurs temps avaient désormais abandonné les arts libéraux aux plébéiens » (lettre du pseudo-Ilario à Uguccione della Faggiola)L'expérience seigneuriale : régularités structurelles, grammaire politique, contextes locauxÀ Pise : une histoire discontinue et graduelleLe Zibaldone Laurenziano et la « leggenda dantesca del Boccacio », (Giuseppe Billanovitch)Boccace et le Trattatello in laude di Dante : aimer dans la Comédie « la richesse du texte en artifices, la multitude des histoires, la sublimité des sens cachés sous le voile poétique »La légende de la triple dédicace (l'Enfer à Uguccione della Faggiola, le Purgatoire à Moroello Malaspina, le Paradis à Frédéric II) : les raisons politiques d'une fiction littéraireLe bivium : Albertino Mussato et Dante en 1311 et en 1316Cangrande della Scala d'après Giovanni Villani : questi fu il maggior tiranno e 'll più possente e ricco che fosse in Lombardia da Azzolino da Romano infino allora (X, 138), valente tiranno e signore da bene […] e amico del nostro Comune (X, 95)Coup de force poétique, transgression politique et privilegium : « En effet, ceux qui puisent leurs forces dans l'intellect et dans la raison et qui ont reçu le don divin de la liberté ne sont assujettis à aucun usage ; et il ne faut pas s'en étonner, car ils ne sont pas inspirés par les lois, mais ce sont eux qui inspirent les lois » (Dante, Épître à Cangrande dalla Scala)« Tandis que je lisais ces phrases, j'ai cru entendre la voix de Boccaccio qui murmurait à mon oreille : "Ser Ciappelletto, c'est moi" » (Carlo Ginzburg, « L'épître à Cangrande et ses deux auteurs », Po&sie, 2008)Vie et mœurs de François Pétrarque, florentin : histoires d'admiration et de rivalité (1343-1353)Pétrarque à Milan, Auri sacra fames (Enéide, III, 57)Lettre de Pétrarque à Boccace (Familiares, XXI, 15 : mai 1359)« Ils mentent donc ceux qui disent que je cherche à diminuer sa renommée »Un moment de vérité : « Et qui enfin peut envier celui qui n'envie pas Virgile, à moins que lui envie les applaudissements et les rauques clameurs des foulons, des gargotiers et des saltimbanques (fullonum et cauponum et lanistarum) et de tous ces gens dont la louange constitue en réalité une offense, au point que je me félicite, avec Virgile lui-même et Homère, de m'en trouver privé : je sais bien ce que vaut auprès des personnes cultivées l'éloge des incultes »Pétrarque, La Vie solitaire et l'art du placement (Étienne Anheim)De la haine du peuple à la haine des intellectuels : « Ce sont eux qui promènent par toute la ville, comme un vieux bibelot à vendre, leur sottise cultivée »Les lettres à la postérité (Familiares, XXIV) comme fiction politique : « Mais quel délire t'a poussé contre Antoine ? L'amour de la République, je crois, que tu reconnaissais s'être déjà écroulée de fond en comble » (Pétrarque à Cicéron)Négocier avec ses précurseurs lointains, préfigurer la politique à venir : la curialisation de l'exercice du gouvernement au QuattrocentoL'impossible portrait de groupe des auteurs de la novellistica toscane et la déstabilisation de la fonction auteur : de Gentile Sermini au pseudo-Sermini (Monica Marchi)Franco Sacchetti pendant la « Guerre des Huit Saints » (1375-1378) : Florence defensor libertatisIo scrittor : écrire, recueillir et composer le TrecentonovelleFranco Sacchetti, l'engagement civique et les frustrations d'une carrière politique : la canaille littéraire des « Rousseau du ruisseau » ?À l'inverse, Giovanni Sercambi et le buon governo de la seigneurieVendre la mèche : engagement sartrien, déclassement social et aspiration à une aristocratie fictive (Ronan de Calan, La littérature pure. Histoire d'un déclassement, 2017).
2/6/2018 • 1 hour, 3 minutes, 43 seconds
04 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie« Malheureusement, les hommes généreux pour lesquels ces choses avaient été écrites en de meilleurs temps avaient désormais abandonné les arts libéraux aux plébéiens » (lettre du pseudo-Ilario à Uguccione della Faggiola)L'expérience seigneuriale : régularités structurelles, grammaire politique, contextes locauxÀ Pise : une histoire discontinue et graduelleLe Zibaldone Laurenziano et la « leggenda dantesca del Boccacio », (Giuseppe Billanovitch)Boccace et le Trattatello in laude di Dante : aimer dans la Comédie « la richesse du texte en artifices, la multitude des histoires, la sublimité des sens cachés sous le voile poétique »La légende de la triple dédicace (l'Enfer à Uguccione della Faggiola, le Purgatoire à Moroello Malaspina, le Paradis à Frédéric II) : les raisons politiques d'une fiction littéraireLe bivium : Albertino Mussato et Dante en 1311 et en 1316Cangrande della Scala d'après Giovanni Villani : questi fu il maggior tiranno e 'll più possente e ricco che fosse in Lombardia da Azzolino da Romano infino allora (X, 138), valente tiranno e signore da bene […] e amico del nostro Comune (X, 95)Coup de force poétique, transgression politique et privilegium : « En effet, ceux qui puisent leurs forces dans l'intellect et dans la raison et qui ont reçu le don divin de la liberté ne sont assujettis à aucun usage ; et il ne faut pas s'en étonner, car ils ne sont pas inspirés par les lois, mais ce sont eux qui inspirent les lois » (Dante, Épître à Cangrande dalla Scala)« Tandis que je lisais ces phrases, j'ai cru entendre la voix de Boccaccio qui murmurait à mon oreille : "Ser Ciappelletto, c'est moi" » (Carlo Ginzburg, « L'épître à Cangrande et ses deux auteurs », Po&sie, 2008)Vie et mœurs de François Pétrarque, florentin : histoires d'admiration et de rivalité (1343-1353)Pétrarque à Milan, Auri sacra fames (Enéide, III, 57)Lettre de Pétrarque à Boccace (Familiares, XXI, 15 : mai 1359)« Ils mentent donc ceux qui disent que je cherche à diminuer sa renommée »Un moment de vérité : « Et qui enfin peut envier celui qui n'envie pas Virgile, à moins que lui envie les applaudissements et les rauques clameurs des foulons, des gargotiers et des saltimbanques (fullonum et cauponum et lanistarum) et de tous ces gens dont la louange constitue en réalité une offense, au point que je me félicite, avec Virgile lui-même et Homère, de m'en trouver privé : je sais bien ce que vaut auprès des personnes cultivées l'éloge des incultes »Pétrarque, La Vie solitaire et l'art du placement (Étienne Anheim)De la haine du peuple à la haine des intellectuels : « Ce sont eux qui promènent par toute la ville, comme un vieux bibelot à vendre, leur sottise cultivée »Les lettres à la postérité (Familiares, XXIV) comme fiction politique : « Mais quel délire t'a poussé contre Antoine ? L'amour de la République, je crois, que tu reconnaissais s'être déjà écroulée de fond en comble » (Pétrarque à Cicéron)Négocier avec ses précurseurs lointains, préfigurer la politique à venir : la curialisation de l'exercice du gouvernement au QuattrocentoL'impossible portrait de groupe des auteurs de la novellistica toscane et la déstabilisation de la fonction auteur : de Gentile Sermini au pseudo-Sermini (Monica Marchi)Franco Sacchetti pendant la « Guerre des Huit Saints » (1375-1378) : Florence defensor libertatisIo scrittor : écrire, recueillir et composer le TrecentonovelleFranco Sacchetti, l'engagement civique et les frustrations d'une carrière politique : la canaille littéraire des « Rousseau du ruisseau » ?À l'inverse, Giovanni Sercambi et le buon governo de la seigneurieVendre la mèche : engagement sartrien, déclassement social et aspiration à une aristocratie fictive (Ronan de Calan, La littérature pure. Histoire d'un déclassement, 2017).
1/30/2018 • 1 hour, 3 minutes, 55 seconds
04 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie« Malheureusement, les hommes généreux pour lesquels ces choses avaient été écrites en de meilleurs temps avaient désormais abandonné les arts libéraux aux plébéiens » (lettre du pseudo-Ilario à Uguccione della Faggiola)L'expérience seigneuriale : régularités structurelles, grammaire politique, contextes locauxÀ Pise : une histoire discontinue et graduelleLe Zibaldone Laurenziano et la « leggenda dantesca del Boccacio », (Giuseppe Billanovitch)Boccace et le Trattatello in laude di Dante : aimer dans la Comédie « la richesse du texte en artifices, la multitude des histoires, la sublimité des sens cachés sous le voile poétique »La légende de la triple dédicace (l'Enfer à Uguccione della Faggiola, le Purgatoire à Moroello Malaspina, le Paradis à Frédéric II) : les raisons politiques d'une fiction littéraireLe bivium : Albertino Mussato et Dante en 1311 et en 1316Cangrande della Scala d'après Giovanni Villani : questi fu il maggior tiranno e 'll più possente e ricco che fosse in Lombardia da Azzolino da Romano infino allora (X, 138), valente tiranno e signore da bene […] e amico del nostro Comune (X, 95)Coup de force poétique, transgression politique et privilegium : « En effet, ceux qui puisent leurs forces dans l'intellect et dans la raison et qui ont reçu le don divin de la liberté ne sont assujettis à aucun usage ; et il ne faut pas s'en étonner, car ils ne sont pas inspirés par les lois, mais ce sont eux qui inspirent les lois » (Dante, Épître à Cangrande dalla Scala)« Tandis que je lisais ces phrases, j'ai cru entendre la voix de Boccaccio qui murmurait à mon oreille : "Ser Ciappelletto, c'est moi" » (Carlo Ginzburg, « L'épître à Cangrande et ses deux auteurs », Po&sie, 2008)Vie et mœurs de François Pétrarque, florentin : histoires d'admiration et de rivalité (1343-1353)Pétrarque à Milan, Auri sacra fames (Enéide, III, 57)Lettre de Pétrarque à Boccace (Familiares, XXI, 15 : mai 1359)« Ils mentent donc ceux qui disent que je cherche à diminuer sa renommée »Un moment de vérité : « Et qui enfin peut envier celui qui n'envie pas Virgile, à moins que lui envie les applaudissements et les rauques clameurs des foulons, des gargotiers et des saltimbanques (fullonum et cauponum et lanistarum) et de tous ces gens dont la louange constitue en réalité une offense, au point que je me félicite, avec Virgile lui-même et Homère, de m'en trouver privé : je sais bien ce que vaut auprès des personnes cultivées l'éloge des incultes »Pétrarque, La Vie solitaire et l'art du placement (Étienne Anheim)De la haine du peuple à la haine des intellectuels : « Ce sont eux qui promènent par toute la ville, comme un vieux bibelot à vendre, leur sottise cultivée »Les lettres à la postérité (Familiares, XXIV) comme fiction politique : « Mais quel délire t'a poussé contre Antoine ? L'amour de la République, je crois, que tu reconnaissais s'être déjà écroulée de fond en comble » (Pétrarque à Cicéron)Négocier avec ses précurseurs lointains, préfigurer la politique à venir : la curialisation de l'exercice du gouvernement au QuattrocentoL'impossible portrait de groupe des auteurs de la novellistica toscane et la déstabilisation de la fonction auteur : de Gentile Sermini au pseudo-Sermini (Monica Marchi)Franco Sacchetti pendant la « Guerre des Huit Saints » (1375-1378) : Florence defensor libertatisIo scrittor : écrire, recueillir et composer le TrecentonovelleFranco Sacchetti, l'engagement civique et les frustrations d'une carrière politique : la canaille littéraire des « Rousseau du ruisseau » ?À l'inverse, Giovanni Sercambi et le buon governo de la seigneurieVendre la mèche : engagement sartrien, déclassement social et aspiration à une aristocratie fictive (Ronan de Calan, La littérature pure. Histoire d'un déclassement, 2017).
1/30/2018 • 1 hour, 3 minutes, 55 seconds
03 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieVérone, 1350 : Boccace et sœur BéatriceLe nom est un « bouclier de vérité » : « Lorsqu'à mes yeux parut pour la première fois la glorieuse dame de ma pensée, laquelle fut appelée Béatrice par bien des gens qui ne savaient ce que c'est que donner un nom » (Dante, Vita nuova)« A Messer Giovanni Boccaccio payé ce jour dix florins d'or pour qu'il les donne à sœur Béatrice de Dante Alighieri, moniale de Santo Stefano degli Ulivi à Ravenne »Bologne, 1317-1321 : premières attestations documentaires de la diffusion sociale de la CommediaLa société dantesque, depuis le Trecentonovelle de Franco SacchettiQui est Boccace en 1350 ?« Ici commence le livre qui a pour titre Décaméron et pour sous-titre Prince Galehaut, dans lequel sont contenues cent nouvelles dites en dix jours par sept dames et par trois jeunes gens »Francesca da Rimini et Paolo Malatesta : « Galehaut fut le livre et le trouvère » (Inf., IV, 137)Le récit par Boccace de la mort de Paolo et Francesca en 1373, ou la 101e nouvelle du DécaméronUne comédie humaine. « Je veux qu'en cette première journée, chacun soit libre de traiter le sujet qu'il voudra » (Décaméron, I, 1)Quand doit-on commencer à rire ? Dérision, émancipation et critique socialeIo sono una forza del Passato : Pasolini et la Trilogie de la vieBoccace, Genealogiae deorum gentilium libri : la fable est comme un voile ou une écorce qui cache la vérité de l'exemple sous une fictionLes opérations du droit, la théologie et la logique du comme si (Yan Thomas)« Mon histoire est celle de Musciatto Franzesi »De Ceparello à Ciappelletto : un personnage nommé par une équivoqueL'auteur, son narrateur, un personnage historique et son double imaginaire : la chaîne fictionnelleDocumenti di Ser Ciappellatto (Cesare Paoli) , « Notaire de son état, il était fort honteux quand l'un de ses actes (encore qu'il en couchât très peu de sa main) n'était pas tenu pour un faux »La fabrique des saints, une parodie qui tourne mal : « Ainsi donc vécut et mourut maître Ciappelletto de Prato, dont on fit un saint comme vous venez de l'entendre. Loin de moi l'idée de nier sa présence parmi les bienheureux »Quand on cesse de rire : traductions de la première nouvelle de la première journée du Décaméron en castillan et en français (Enrica Zanin)« Car ça commence toujours avant et il finit toujours par manquer quelque chose » (Mathieu Riboulet, Entre les deux il n'y a rien (Verdier, 2015)Infamia, arbitrium, privilegium, pactum : une lecture normative de l'œuvre de Dante (Justin Steinberg, Dante and the Limits of Law, Chicago UP, 2013)Le poète procreator : « N'attend plus de moi ni dire ni mon signe/car libéré, droit et sain est ton arbitre/ ne pas faire à son gré serait forfaire » (Purg., XXVII, 139-142)Ciappelletto est-il le double parodique de Brunetto Latini ? (Robert Hollander, Boccaccio's Dante and the Shaping Force of Satire, 1997)Siete voi qui ser Brunetto ? Dante sous une pluie de feu (André Pézard, 1950)L'Ulysse de Dante désire divenir del mondo esperto (Inf. XXVI, 98)Primo Levi, Si c'est un homme : « J'y suis, attention Pikolo, ouvre grands tes oreilles et ton esprit, j'ai besoin que tu comprennes : Considerate la vostra semenza : /Fatti non foste a viver come bruti / Ma per seguir virtute e conoscenza. Et c'est comme si moi aussi j'entendais ces paroles pour la première fois : comme une sonnerie de trompettes, comme la voix de Dieu ».
1/23/2018 • 1 hour, 3 minutes, 16 seconds
03 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieVérone, 1350 : Boccace et sœur BéatriceLe nom est un « bouclier de vérité » : « Lorsqu'à mes yeux parut pour la première fois la glorieuse dame de ma pensée, laquelle fut appelée Béatrice par bien des gens qui ne savaient ce que c'est que donner un nom » (Dante, Vita nuova)« A Messer Giovanni Boccaccio payé ce jour dix florins d'or pour qu'il les donne à sœur Béatrice de Dante Alighieri, moniale de Santo Stefano degli Ulivi à Ravenne »Bologne, 1317-1321 : premières attestations documentaires de la diffusion sociale de la CommediaLa société dantesque, depuis le Trecentonovelle de Franco SacchettiQui est Boccace en 1350 ?« Ici commence le livre qui a pour titre Décaméron et pour sous-titre Prince Galehaut, dans lequel sont contenues cent nouvelles dites en dix jours par sept dames et par trois jeunes gens »Francesca da Rimini et Paolo Malatesta : « Galehaut fut le livre et le trouvère » (Inf., IV, 137)Le récit par Boccace de la mort de Paolo et Francesca en 1373, ou la 101e nouvelle du DécaméronUne comédie humaine. « Je veux qu'en cette première journée, chacun soit libre de traiter le sujet qu'il voudra » (Décaméron, I, 1)Quand doit-on commencer à rire ? Dérision, émancipation et critique socialeIo sono una forza del Passato : Pasolini et la Trilogie de la vieBoccace, Genealogiae deorum gentilium libri : la fable est comme un voile ou une écorce qui cache la vérité de l'exemple sous une fictionLes opérations du droit, la théologie et la logique du comme si (Yan Thomas)« Mon histoire est celle de Musciatto Franzesi »De Ceparello à Ciappelletto : un personnage nommé par une équivoqueL'auteur, son narrateur, un personnage historique et son double imaginaire : la chaîne fictionnelleDocumenti di Ser Ciappellatto (Cesare Paoli) , « Notaire de son état, il était fort honteux quand l'un de ses actes (encore qu'il en couchât très peu de sa main) n'était pas tenu pour un faux »La fabrique des saints, une parodie qui tourne mal : « Ainsi donc vécut et mourut maître Ciappelletto de Prato, dont on fit un saint comme vous venez de l'entendre. Loin de moi l'idée de nier sa présence parmi les bienheureux »Quand on cesse de rire : traductions de la première nouvelle de la première journée du Décaméron en castillan et en français (Enrica Zanin)« Car ça commence toujours avant et il finit toujours par manquer quelque chose » (Mathieu Riboulet, Entre les deux il n'y a rien (Verdier, 2015)Infamia, arbitrium, privilegium, pactum : une lecture normative de l'œuvre de Dante (Justin Steinberg, Dante and the Limits of Law, Chicago UP, 2013)Le poète procreator : « N'attend plus de moi ni dire ni mon signe/car libéré, droit et sain est ton arbitre/ ne pas faire à son gré serait forfaire » (Purg., XXVII, 139-142)Ciappelletto est-il le double parodique de Brunetto Latini ? (Robert Hollander, Boccaccio's Dante and the Shaping Force of Satire, 1997)Siete voi qui ser Brunetto ? Dante sous une pluie de feu (André Pézard, 1950)L'Ulysse de Dante désire divenir del mondo esperto (Inf. XXVI, 98)Primo Levi, Si c'est un homme : « J'y suis, attention Pikolo, ouvre grands tes oreilles et ton esprit, j'ai besoin que tu comprennes : Considerate la vostra semenza : /Fatti non foste a viver come bruti / Ma per seguir virtute e conoscenza. Et c'est comme si moi aussi j'entendais ces paroles pour la première fois : comme une sonnerie de trompettes, comme la voix de Dieu ».
1/23/2018 • 1 hour, 3 minutes, 16 seconds
02 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieSuivre les « narrateurs habiles et légers », d'accord, mais qu'est-ce que la légèreté ?Italo Calvino appelle « légèreté pensive » (pensosità) cet élan qui fait paraître pesante, inerte et opaque la frivolité (Leçons américaines, 1986)Boccace, Décaméron, neuvième nouvelle de la sixième journée : histoire d'une brigata spendericciaSept femmes, trois hommes et deux personnages historiques : Betto Brunelleschi et Guido CavalcantiTemps de l'histoire, temps de la narration et passé récent« Il se trouvait donc entre les colonnes de porphyre que l'on peut toujours voir, les tombeaux et la porte de San Giovanni, quand messire Betto, traversant à cheval la place de Santa Reparata avec sa compagnie, l'aperçut parmi ces sépultures et dit en accord avec ses amis : "allons lui chercher noise" (Andiamo a dargli briga) »Une accusation d'athéisme un peu cavalière« Se voyant encerclé, Guido leur répondit avec promptitude (prestamente) : "Seigneurs, vous êtes ici chez vous, livre à vous de me dire ce que vous vous semble" : puis ayant posé la main sur l'un de ces tombeaux qui étaient très hauts, il prit son élan et, doué qu'il était d'une parfaite légèreté (sì come colui che leggerissimo era), se retrouva de l'autre côté ; leur ayant échappé, il s'en alla »L'éloge, par Italo Calvino, du bond léger : « Que sa gravité recèle le secret de la légèreté, tandis que ce que beaucoup prennent pour la vitalité des temps, bruyante, agressive, trépignante et tapageuse, appartient au royaume de la mort, comme un cimetière d'automobiles rouillées »Historiciser notre lecture de la nouvelle : Giorgio Inglese, Francesco Baussi, Fosca Mariani ZiniQu'est-ce qu'un cas ? « La forme du cas a ceci de particulier qu'elle pose une question sans pouvoir donner la réponse, qu'elle nous impose l'obligation de décider mais sans contenir la décision elle-même — elle est le lieu où s'effectue la pesée mais non pas encore le résultat » (André Jolles, Formes simples, Paris, 1972)Le récit cadre de la sixième journée du Décaméron, le trait d'esprit comme morsure légère : « je veux vous rappeler que la nature de la répartie n'est pas de mordre comme un chien, mais comme une brebis »La chute ne sera pas mortelle : Guido Cavalcanti se dégage, Betto Brunelleschi se fait l'interprète de sa propre défaiteLa violence d'un magnat : « Et beaucoup se réjouirent de sa mort, car ce fut un bien triste citoyen » (Dino Compagni, Cronica, à propos de la mort en 1311 de Betto Brunelleschi)Retour à la cité (Christiane Klapisch-Zuber, 2006) : quand le magnat négocie sa réintégration dans le fonctionnement ordinaire des institutions communalesGuido Cavalcanti, « l'un des meilleurs dialecticiens du monde, excellent expert en philosophie naturelle » : loquens ut naturalisAverroès, les épicuriens et la leggiadria de GuidoMesser Brunetto, questa pulzelletta (Dante, Rime, sonnet 99)La brigata de Dante et de Guido Calvalcanti : une poésie du savoir (Emanuele Coccia et Sylvain Piron)Une société dantesque : fiction du cas, friction des normes1348 : histoire globale d'un événement de longue durée« Ceuls qui moururent/nul ne les pourroit nombrer/ Ymaginer, penser ne dire/Figurer, monstrer ne ecrire » (Guillaume de Machaut)Des textes de la pratique qui ne documentent que les à-côtés du désastreMillard Meiss, La peinture à Florence et à Sienne après la Peste noire (1951) : la peinture donne-t-elle à voir l'irruption de la mort ?Vasari et le déni de peste : « la chance prodigieuse de vivre au temps de Messire François Pétrarque »La peste n'est pas dépeinte, elle est peinte ; elle n'est pas décrite, elle est écrite (Georges Didi-Hubermann, « Feux d'images. Un malaise dans la représentation du XIVe siècle », préface à Millard Meiss)Défiguration de masse et décomposition de la ressemblance« Après ce bouleversement, la cité vécut en paix jusqu'en 1348, époque de cette peste mémorable (quella memorabile pestilenzia) décrite par Giovanni Bocaccio avec tant d'éloquence, et qui enleva dans Florence plus de quatre-vingt-seize âmes » (Machiavel, Histoires florentines, 1526)Inoubliable mais indescriptible, la peste ne produit pas de bouleversements politiquesLire en historien la description en « frontispice » du Décaméron : « …entassés là, comme les marchandises que l'on empile dans les cales des navires, ils étaient couche après couche recouverts d'un peu de terre jusqu'à ce que l'on fût au sommet de la fosse »Après cet « horrible commencement », traverser l'effroi : « Mais je ne voudrais pas que l'effroi vous interdise d'aller plus avant »Guido Cavalcanti, « narrateur habile et léger » : lui aussi a traversé l'effro« L'instant de survivre est instant de puissance. L'effroi d'avoir vu la mort se dénoue en satisfaction, puisque l'on n'est pas soi-même le mort » (Elias Canetti, Masse et puissance, 1960)Le tyran est un survivant au pouvoir.
1/16/2018 • 1 hour, 6 minutes, 41 seconds
02 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieSuivre les « narrateurs habiles et légers », d'accord, mais qu'est-ce que la légèreté ?Italo Calvino appelle « légèreté pensive » (pensosità) cet élan qui fait paraître pesante, inerte et opaque la frivolité (Leçons américaines, 1986)Boccace, Décaméron, neuvième nouvelle de la sixième journée : histoire d'une brigata spendericciaSept femmes, trois hommes et deux personnages historiques : Betto Brunelleschi et Guido CavalcantiTemps de l'histoire, temps de la narration et passé récent« Il se trouvait donc entre les colonnes de porphyre que l'on peut toujours voir, les tombeaux et la porte de San Giovanni, quand messire Betto, traversant à cheval la place de Santa Reparata avec sa compagnie, l'aperçut parmi ces sépultures et dit en accord avec ses amis : "allons lui chercher noise" (Andiamo a dargli briga) »Une accusation d'athéisme un peu cavalière« Se voyant encerclé, Guido leur répondit avec promptitude (prestamente) : "Seigneurs, vous êtes ici chez vous, livre à vous de me dire ce que vous vous semble" : puis ayant posé la main sur l'un de ces tombeaux qui étaient très hauts, il prit son élan et, doué qu'il était d'une parfaite légèreté (sì come colui che leggerissimo era), se retrouva de l'autre côté ; leur ayant échappé, il s'en alla »L'éloge, par Italo Calvino, du bond léger : « Que sa gravité recèle le secret de la légèreté, tandis que ce que beaucoup prennent pour la vitalité des temps, bruyante, agressive, trépignante et tapageuse, appartient au royaume de la mort, comme un cimetière d'automobiles rouillées »Historiciser notre lecture de la nouvelle : Giorgio Inglese, Francesco Baussi, Fosca Mariani ZiniQu'est-ce qu'un cas ? « La forme du cas a ceci de particulier qu'elle pose une question sans pouvoir donner la réponse, qu'elle nous impose l'obligation de décider mais sans contenir la décision elle-même — elle est le lieu où s'effectue la pesée mais non pas encore le résultat » (André Jolles, Formes simples, Paris, 1972)Le récit cadre de la sixième journée du Décaméron, le trait d'esprit comme morsure légère : « je veux vous rappeler que la nature de la répartie n'est pas de mordre comme un chien, mais comme une brebis »La chute ne sera pas mortelle : Guido Cavalcanti se dégage, Betto Brunelleschi se fait l'interprète de sa propre défaiteLa violence d'un magnat : « Et beaucoup se réjouirent de sa mort, car ce fut un bien triste citoyen » (Dino Compagni, Cronica, à propos de la mort en 1311 de Betto Brunelleschi)Retour à la cité (Christiane Klapisch-Zuber, 2006) : quand le magnat négocie sa réintégration dans le fonctionnement ordinaire des institutions communalesGuido Cavalcanti, « l'un des meilleurs dialecticiens du monde, excellent expert en philosophie naturelle » : loquens ut naturalisAverroès, les épicuriens et la leggiadria de GuidoMesser Brunetto, questa pulzelletta (Dante, Rime, sonnet 99)La brigata de Dante et de Guido Calvalcanti : une poésie du savoir (Emanuele Coccia et Sylvain Piron)Une société dantesque : fiction du cas, friction des normes1348 : histoire globale d'un événement de longue durée« Ceuls qui moururent/nul ne les pourroit nombrer/ Ymaginer, penser ne dire/Figurer, monstrer ne ecrire » (Guillaume de Machaut)Des textes de la pratique qui ne documentent que les à-côtés du désastreMillard Meiss, La peinture à Florence et à Sienne après la Peste noire (1951) : la peinture donne-t-elle à voir l'irruption de la mort ?Vasari et le déni de peste : « la chance prodigieuse de vivre au temps de Messire François Pétrarque »La peste n'est pas dépeinte, elle est peinte ; elle n'est pas décrite, elle est écrite (Georges Didi-Hubermann, « Feux d'images. Un malaise dans la représentation du XIVe siècle », préface à Millard Meiss)Défiguration de masse et décomposition de la ressemblance« Après ce bouleversement, la cité vécut en paix jusqu'en 1348, époque de cette peste mémorable (quella memorabile pestilenzia) décrite par Giovanni Bocaccio avec tant d'éloquence, et qui enleva dans Florence plus de quatre-vingt-seize âmes » (Machiavel, Histoires florentines, 1526)Inoubliable mais indescriptible, la peste ne produit pas de bouleversements politiquesLire en historien la description en « frontispice » du Décaméron : « …entassés là, comme les marchandises que l'on empile dans les cales des navires, ils étaient couche après couche recouverts d'un peu de terre jusqu'à ce que l'on fût au sommet de la fosse »Après cet « horrible commencement », traverser l'effroi : « Mais je ne voudrais pas que l'effroi vous interdise d'aller plus avant »Guido Cavalcanti, « narrateur habile et léger » : lui aussi a traversé l'effro« L'instant de survivre est instant de puissance. L'effroi d'avoir vu la mort se dénoue en satisfaction, puisque l'on n'est pas soi-même le mort » (Elias Canetti, Masse et puissance, 1960)Le tyran est un survivant au pouvoir.
1/16/2018 • 1 hour, 6 minutes, 41 seconds
01 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieTout pouvoir est pouvoir de mise en récit. Cela ne signifie pas seulement qu'il se donne à voir et à comprendre par des fables ou des intrigues ; cela veut dire plus profondément qu'il ne devient pleinement efficient qu'à partir du moment où il réoriente les récits de vie de ceux qu'il domine. On doit sans louvoyer envisager cette puissance narrative de l'exercice du pouvoir, qui noue art de gouverner et art de raconter, si l'on veut comprendre les formes historiques du consentement au pouvoir autoritaire. Pour le dire vite : ce qu'il y a d'attirant dans la tyrannie, c'est sa puissance fictionnelle. Non seulement sa capacité à parler et à faire parler, mais à susciter une énergie narrative. Et le travail de l'historien consiste à chercher le moyen d'y contrevenir.Le cours de cette année poursuit la réflexion sur les fictions politiques engagées l'année précédente. Il s'agit toujours de les envisager comme des formes narratives de la théorie politique, susceptibles de produire des effets de vérité sur le présent et d'en partager l'expérience à partir d'un passé historique. Mais il s'agit désormais de le faire à partir d'un corpus strictement limité : celui de la novellistica italienne qui, dans l'effet de souffle de la révolution narrative du Décameron de Boccace, constitue un genre littéraire propre aux sociétés urbaines de l'Italie communale et post-communale, en Toscane notamment. Du XIVe au XVIe siècle, se développe donc une production textuelle singulière porteuse d'un savoir social particulièrement corrosif dont on tentera d'analyser la sociologie implicite.De Franco Sacchetti a Matteo Bandello, en passant par Giovanni Sercambi, le pseudo-Gentile Sermini et tant d'autres, souvent anonymes, cette littérature des novelle permet de saisir, notamment à l'épreuve de la beffa, c'est-à-dire du pouvoir subversif de la dérision, les mécanismes d'une société politique en crise. On tentera d'en dresser le portrait historique, en prenant la mesure des rapports entre expérience seigneuriale et tradition communale. Pour cela, on s'intéressera en particulier au destin fictionnel de Bernabò Visconti, seigneur de Milan de 1354 à 1385, qui devient, de son vivant même, un personnage de novelle, incarnant un personnage inquiétant et grotesque qui se maintient comme tel un siècle durant, au fur et à mesure du développement du genre. Il devient alors ce tyran attirant qui, par son rôle de beffatore ne cesse de créer des surprises et de susciter le rire. Ce rire est-il libérateur où installe-t-il dans l'horizon narratif familier de la nouvelle une certaine acclimatation au pouvoir tyrannique ?« Pour l'essentiel, le pouvoir autoritaire est librement consenti » (Timothy Snyder, De la tyrannie.Vingt leçons du XXe siècle, Paris, 2017)Un recueil de nouvelles théoriques, où « l'obéissance anticipée » de l'intrigue à la moraleL'hypothèse de départ : un nouage entre art de gouverner et art de raconterQuand le « roman du dictateur » mime et mine la voix du despote : le Recours de la méthode (Alejo Carpentier, 1974)« Il jette sa voix devant lui pour être entendu, écouté, obéi. Bien qu'il paraisse muet, taciturne, silencieux, son silence est un ordre. Ce qui signifie que dans le Suprême, il y a au moins deux personnes » (Augusto Roa Bastos,Moi, le Suprême, 1974)Le « monologue multiple » de Gabriel Garcia Marquez et la « neutralisation de la fascination » (Emmanuel Bouju, La transcription de l'histoire, Rennes, 2006)Le chaos carnavalesque : « un bobard de l'imagination, un tyran pour rire qui ne sut jamais où était l'envers et où était l'endroit de cette vie » (L'Automne du patriarche, 1975)Retour à la novellistica toscane et rappels de quelques propositions du cours de l'année précédentes sur les fictions politiques comme expérience de production de la vérité : métaphores, préfigurations, pastiches et postiches« Ce qui distingue la fiction de l'expérience ordinaire, ce n'est pas un défaut de réalité mais un surcroît de rationalité » (Jacques Rancière, Les bords de la fiction, Paris, 2017)« Face au Léviathan » : Rebrousser chemin à partir d'un point de répulsion : le nouvel âge de la représentationLe 15 mai 1610, au matin, un enfant de huit ans…Louis XIII et la fiction politique des origines médiévales du Lit de justiceDérèglement rituel, improvisation théâtrale« Qu'a-t-on à opposer au pouvoir absolu de l'empereur ? Ni un droit ni des idées. Seulement une accumulation de souvenirs, vrais ou inventés, et d'images » (Gilbert Dagron, Empereur et prêtre. Etude sur le "césaropapisme" byzantin, Paris, 1996)Le « portrait royal rasséréné » de Henri IV et le « roi hanté » Louis XIII : l'âge de la « représentation représentée » (Yann Lignereux, Les rois imaginaires. Une histoire visuelle de la monarchie de Charles VIII à Louis XIV, Rennes, 2016)Le coup de majesté de l'assassinat de Concini le 25 avril 1617Une histoire visuelle et textuelle de la fabrique du tyran (Hélène Duccini, Faire voir, faire croire. L'opinion publique sous Louis XIII, Seyssel, 2003)Les Merveilles et coup d'essai de Louis le Juste : « Que vous, Sire, ayez eu une patience merveilleuse et conduite si secrète qu'à peine se trouverait-elle semblable aux âmes les plus chenues, c'est ce qui me jette comme hors de moi »Le prince idéal comme illusion d'optique : une histoire d'anamorphoses et de prises de positionLe coup d'État est comme l'orage : « on voit plus tôt tomber le tonnerre qu'on ne l'a entendu gronder dans les nuées » (Gabriel Naudé, Considérations politiques sur les coups d'Etat, 1639)La fiction politique comme loupe politique qui permet d'observer, après-coup, les signes avant-coureursUn avant-coup fictionnel : le ballet dansé de la Délivrance de Renaud (29 janvier 1617)La force de frappe du pathétique politique fait défaillir la représentation (Sylvaine Guyot)Un feu purificateur va « rappeler tous ses sujets à leur devoir, et les purger de tous prétextes de désobéissance » (Discours au vray du ballet dansé par le Roy)La théâtralisation du projet politique de Louis XIII, un acting out ?Quand l'événement devient, en temps réel, la scénographie de son propre déroulement « Merci, grand merci à vous, à cette heure je suis roi »Répétition fictionnelle et clôture tragique : La Magicienne étrangèreLes deux costumes du roi : « la force démoniaque du feu [s'est] transformée et intensifiée en lumière du roi soleil » (Giovanni Carreri, Jérusalem délivrée. Gestes d'amour et de guerres, Paris, 2005)Comme dans La fête au bouc (Mario Vargas Llosa, 2000), le désordre burlesque est une inversion carnavalesque aux fins du pouvoir« Et voici le mythe fondateur ; un jour, la force, au lieu de frapper, a parlé ? Au lieu de se faire craindre, par sa nécessité même, de faire la guerre pour s'assurer qu'elle était la plus forte, elle s'est investie dans les signes qui la désignent, elle s'est mise en représentation. Elle a tenu discours, un discours qui répète seulement ceci ; qu'elle est la justice et la vérité » (Louis Marin, Le récit est un piège, 1978)Est-il imparable ? La leçon des bêtes et les « brèves machinations » des fables (La Fontaine, « Le pouvoir des fables ») et des contes (Perrault, Le chat botté)Suivons les « narrateurs habiles et légers ».
1/9/2018 • 1 hour, 4 minutes, 51 seconds
01 - Fictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannie
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2017-2018Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleFictions politiques (2) : nouvelles de la tyrannieTout pouvoir est pouvoir de mise en récit. Cela ne signifie pas seulement qu'il se donne à voir et à comprendre par des fables ou des intrigues ; cela veut dire plus profondément qu'il ne devient pleinement efficient qu'à partir du moment où il réoriente les récits de vie de ceux qu'il domine. On doit sans louvoyer envisager cette puissance narrative de l'exercice du pouvoir, qui noue art de gouverner et art de raconter, si l'on veut comprendre les formes historiques du consentement au pouvoir autoritaire. Pour le dire vite : ce qu'il y a d'attirant dans la tyrannie, c'est sa puissance fictionnelle. Non seulement sa capacité à parler et à faire parler, mais à susciter une énergie narrative. Et le travail de l'historien consiste à chercher le moyen d'y contrevenir.Le cours de cette année poursuit la réflexion sur les fictions politiques engagées l'année précédente. Il s'agit toujours de les envisager comme des formes narratives de la théorie politique, susceptibles de produire des effets de vérité sur le présent et d'en partager l'expérience à partir d'un passé historique. Mais il s'agit désormais de le faire à partir d'un corpus strictement limité : celui de la novellistica italienne qui, dans l'effet de souffle de la révolution narrative du Décameron de Boccace, constitue un genre littéraire propre aux sociétés urbaines de l'Italie communale et post-communale, en Toscane notamment. Du XIVe au XVIe siècle, se développe donc une production textuelle singulière porteuse d'un savoir social particulièrement corrosif dont on tentera d'analyser la sociologie implicite.De Franco Sacchetti a Matteo Bandello, en passant par Giovanni Sercambi, le pseudo-Gentile Sermini et tant d'autres, souvent anonymes, cette littérature des novelle permet de saisir, notamment à l'épreuve de la beffa, c'est-à-dire du pouvoir subversif de la dérision, les mécanismes d'une société politique en crise. On tentera d'en dresser le portrait historique, en prenant la mesure des rapports entre expérience seigneuriale et tradition communale. Pour cela, on s'intéressera en particulier au destin fictionnel de Bernabò Visconti, seigneur de Milan de 1354 à 1385, qui devient, de son vivant même, un personnage de novelle, incarnant un personnage inquiétant et grotesque qui se maintient comme tel un siècle durant, au fur et à mesure du développement du genre. Il devient alors ce tyran attirant qui, par son rôle de beffatore ne cesse de créer des surprises et de susciter le rire. Ce rire est-il libérateur où installe-t-il dans l'horizon narratif familier de la nouvelle une certaine acclimatation au pouvoir tyrannique ?« Pour l'essentiel, le pouvoir autoritaire est librement consenti » (Timothy Snyder, De la tyrannie.Vingt leçons du XXe siècle, Paris, 2017)Un recueil de nouvelles théoriques, où « l'obéissance anticipée » de l'intrigue à la moraleL'hypothèse de départ : un nouage entre art de gouverner et art de raconterQuand le « roman du dictateur » mime et mine la voix du despote : le Recours de la méthode (Alejo Carpentier, 1974)« Il jette sa voix devant lui pour être entendu, écouté, obéi. Bien qu'il paraisse muet, taciturne, silencieux, son silence est un ordre. Ce qui signifie que dans le Suprême, il y a au moins deux personnes » (Augusto Roa Bastos,Moi, le Suprême, 1974)Le « monologue multiple » de Gabriel Garcia Marquez et la « neutralisation de la fascination » (Emmanuel Bouju, La transcription de l'histoire, Rennes, 2006)Le chaos carnavalesque : « un bobard de l'imagination, un tyran pour rire qui ne sut jamais où était l'envers et où était l'endroit de cette vie » (L'Automne du patriarche, 1975)Retour à la novellistica toscane et rappels de quelques propositions du cours de l'année précédentes sur les fictions politiques comme expérience de production de la vérité : métaphores, préfigurations, pastiches et postiches« Ce qui distingue la fiction de l'expérience ordinaire, ce n'est pas un défaut de réalité mais un surcroît de rationalité » (Jacques Rancière, Les bords de la fiction, Paris, 2017)« Face au Léviathan » : Rebrousser chemin à partir d'un point de répulsion : le nouvel âge de la représentationLe 15 mai 1610, au matin, un enfant de huit ans…Louis XIII et la fiction politique des origines médiévales du Lit de justiceDérèglement rituel, improvisation théâtrale« Qu'a-t-on à opposer au pouvoir absolu de l'empereur ? Ni un droit ni des idées. Seulement une accumulation de souvenirs, vrais ou inventés, et d'images » (Gilbert Dagron, Empereur et prêtre. Etude sur le "césaropapisme" byzantin, Paris, 1996)Le « portrait royal rasséréné » de Henri IV et le « roi hanté » Louis XIII : l'âge de la « représentation représentée » (Yann Lignereux, Les rois imaginaires. Une histoire visuelle de la monarchie de Charles VIII à Louis XIV, Rennes, 2016)Le coup de majesté de l'assassinat de Concini le 25 avril 1617Une histoire visuelle et textuelle de la fabrique du tyran (Hélène Duccini, Faire voir, faire croire. L'opinion publique sous Louis XIII, Seyssel, 2003)Les Merveilles et coup d'essai de Louis le Juste : « Que vous, Sire, ayez eu une patience merveilleuse et conduite si secrète qu'à peine se trouverait-elle semblable aux âmes les plus chenues, c'est ce qui me jette comme hors de moi »Le prince idéal comme illusion d'optique : une histoire d'anamorphoses et de prises de positionLe coup d'État est comme l'orage : « on voit plus tôt tomber le tonnerre qu'on ne l'a entendu gronder dans les nuées » (Gabriel Naudé, Considérations politiques sur les coups d'Etat, 1639)La fiction politique comme loupe politique qui permet d'observer, après-coup, les signes avant-coureursUn avant-coup fictionnel : le ballet dansé de la Délivrance de Renaud (29 janvier 1617)La force de frappe du pathétique politique fait défaillir la représentation (Sylvaine Guyot)Un feu purificateur va « rappeler tous ses sujets à leur devoir, et les purger de tous prétextes de désobéissance » (Discours au vray du ballet dansé par le Roy)La théâtralisation du projet politique de Louis XIII, un acting out ?Quand l'événement devient, en temps réel, la scénographie de son propre déroulement « Merci, grand merci à vous, à cette heure je suis roi »Répétition fictionnelle et clôture tragique : La Magicienne étrangèreLes deux costumes du roi : « la force démoniaque du feu [s'est] transformée et intensifiée en lumière du roi soleil » (Giovanni Carreri, Jérusalem délivrée. 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07 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan
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2/15/2016 • 1 hour, 5 minutes, 38 seconds
06 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan - VIDEO
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2/8/2016 • 1 hour, 3 minutes, 43 seconds
06 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan
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2/8/2016 • 1 hour, 3 minutes, 43 seconds
05 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan - VIDEO
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2/1/2016 • 1 hour, 4 minutes, 11 seconds
05 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan
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2/1/2016 • 1 hour, 4 minutes, 11 seconds
04 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan - VIDEO
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1/25/2016 • 1 hour, 1 minute, 9 seconds
04 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan
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1/25/2016 • 1 hour, 1 minute, 9 seconds
03 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan - VIDEO
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1/18/2016 • 1 hour, 3 minutes, 47 seconds
03 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan
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1/18/2016 • 1 hour, 3 minutes, 47 seconds
02 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan - VIDEO
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1/11/2016 • 1 hour, 1 minute, 38 seconds
02 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan
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1/11/2016 • 1 hour, 1 minute, 38 seconds
01 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan - VIDEO
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1/4/2016 • 1 hour, 1 minute, 5 seconds
01 - Souvenirs, fictions, croyances. Le long Moyen Âge d'Ambroise de Milan
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1/4/2016 • 1 hour, 1 minute, 5 seconds
Leçon inaugurale : Ce que peut l'histoire - VIDEO
Patrice BoucheronCollège de FranceAnnée 2015-2016Histoire des pouvoirs en Europe occidentale, XIIIe-XVIe siècleLeçon inaugurale - Ce que peut l'histoire
12/17/2015 • 1 hour, 7 minutes, 21 seconds
Leçon inaugurale : Ce que peut l'histoire - PDF
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12/17/2015 • 1 hour, 7 minutes, 21 seconds
Leçon inaugurale : Ce que peut l'histoire
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